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Die Zauberflöte” by Wolfgang Amadeus Mozart libretto (French)

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Contents: Personnages; Premier Acte; Deuxième Acte
PREMIER ACTE

La scène est un endroit rocheux parsemé
d’arbres ; de chaque côté se dressent des collines
aux sentiers franchissables, on aperçoit aussi
qu’un temple circulaire.

(À droite, Tamino descend d’un rocher, vêtu d’un
somptueux habit de chasse japonais ; il porte un
arc mais n’a pas de flèches ; un serpent le poursuit.)


N°1 : Introduction

TAMINO
À l’aide, à l’aide, ou je suis perdu !
Malheureuse victime du perfide serpent !
Dieux cléments, voilà qu’il approche !
Ah ! sauvez-moi, protégez-moi !
(Il s’évanouit ; aussitôt, la porte du temple s’ouvre
et trois dames voilées s’approchent, tenant
chacune une lance d’argent à la main.)


LES TROIS DAMES
Meurs, monstre terrible, par notre pouvoir !

Victoire, victoire ! l’exploit est accompli,
Tamino est libéré
grâce à l’audace de notre bras !

PREMIÈRE DAME (l’observant)
Ah ! charmant jouvenceau, doux et beau...

DEUXIÈME DAME
Oui, beau comme jamais je n’en vis !

TROISIÈME DAME
Oui, oui, beau comme une image !

TOUTES LES TROIS
S’il fallait consacrer mon cœur à l’amour,
je le ferais pour ce garçon.
Hâtons-nous auprès de notre Reine,
afin de lui porter cette nouvelle.
Peut-être ce beau jouvenceau
pourra-t-il lui rendre sa sérénité de jadis.

PREMIÈRE DAME
Allez donc et dites-le lui,
je resterai ici entre temps !

DEUXIÈME DAME
Non, non, allez-y vous-mêmes,
c’est moi qui veillerai sur lui !

TROISIÈME DAME
Non, non, cela ne se peut,
moi seule veux le protéger !

PREMIÈRE DAME
Je resterai ici entre temps...

DEUXIÈME DAME
C’est moi qui veillerai sur lui...

TROISIÈME DAME
Moi seule veux le protéger...

PREMIÈRE DAME
... je resterai...

DEUXIÈME DAME
... c’est moi qui veillerai...

TROISIÈME DAME
... je veux le protéger...

PREMIÈRE DAME
... moi !

DEUXIÈME DAME
... moi !

TROISIÈME DAME
... moi !

TOUTES LES TROIS (à part)
Il faudrait que je parte ! Ah ! la bonne idée !
Elles resteraient volontiers seules auprès de lui.
Non, non, cela ne se peut !
Que ne donnerais-je pas
pour vivre avec ce garçon,
et le garder pour moi seule !
Mais nulle ne part ! cela ne se peut !
Mieux vaut donc que je parte.
Ô jouvenceau, aimable et beau,

ô fidèle garçon, adieu,
jusqu’à ce que nous nous revoyons !
(Les Dames sortent. Tamino revient à lui et voit le
serpent mort à ses pieds, mais entendant
quelqu’un s’approcher, il se cache. Papageno
entre, vêtu d’un manteau de plumes, portant sur
son dos une grande cage à oiseaux et tenant une
flûte de Pan.)


N°2 : Air

PAPAGENO
Oui, je suis l’oiseleur,
toujours joyeux, holà hoplala !
Je suis connu
des jeunes et vieux dans tout le pays.
Je sais poser des pièges,
je connais tous les sifflets.
Voilà pourquoi je suis joyeux :
tous les oiseaux sont à moi !
Oui, je suis l’oiseleur,
toujours joyeux, holà hoplala !
Je suis connu
des jeunes et vieux dans tout le pays.
Si j’avais un filet pour attraper les filles,
je les attraperais par douzaines pour moi seul !
Je les enfermerais dans ma maison,
et elles seraient toutes à moi.
Et lorsque toutes les filles seraient à moi,
j’achèterais gentiment des sucreries
et à ma préférée
je les donnerais toutes.

Alors elle m’embrasserait doucement,
elle serait ma femme et moi son mari.
Elle dormirait à mes côtés
et je la bercerais comme une enfant.
(Tandis que Papageno pose sa cage à terre,
Tamino s’avance et apprend que Papageno est un
garçon simple dont la connaissance du monde se
borne à sa cabane de chaume et à ses modestes
besoins ; il troque les oiseaux qu’il attrape contre
la nourriture que lui apportent les trois Dames de
la Reine de la Nuit, dont c’est ici le royaume.
Tamino, lui, est une prince dont le père gouverne
beaucoup de pays et beaucoup de peuples.
Papageno, qui est en vérité très effrayé à la vue de
la dépouille du serpent, prétend l’avoir lui-même
tué, mais les Dames, portant des masques,
viennent pour le punir. Elles lui donnent de l’eau
au lieu de vin, une pierre à la place d’un pain de
sucre et un cadenas pour sa bouche au lieu de
figues. Elles donnent à Tamino un portrait de la
fille de la Reine de la Nuit et lui promettent qu’il
connaîtra le bonheur s’il est capable de l’aimer.
Elles sortent, suivies de Papageno, laissant Tamino
seul, en contemplation devant le portrait.)


N°3 : Air

TAMINO
Ce portrait est un ravissement
comme nul n’en vit jamais de pareil !
Je le sens, devant cette image divine,
mon cœur connaît une émotion nouvelle.
Quelle est-elle ? En vérité, je ne sais,
mais je la sens ici comme un feu me dévorer.
Serait-ce l’amour ?
Oui, oui, ce ne peut être que lui.

Ah ! si je pouvais trouver l’objet de ce portrait !
si elle se tenait là soudain devant mes yeux,
je ferais... je ferais... tendrement, chastement,
oui, que ferais-je ?
Eh bien ! je la ravirais,
je l’étreindrais contre mon cœur brûlant
et elle serait mienne alors pour toujours.
(Il est sur le point de se retirer lorsque les Dames
reviennent, annonçant l’arrivée de leur Reine. Elle
a observé les émotions de Tamino et lui ordonne
de sauver sa fille de la captivité dans laquelle la
tient Sarastro, Grand Prêtre d’Isis et d’Osiris. Il fait
nuit ; la Reine paraît, semblant sortir des
montagnes, tandis que gronde le tonnerre et
luisent les éclairs.)


N°4 : Récitatif et air

LA REINE
Ne tremble pas, mon fils chéri !
Tu es pur, sage et bon.
Un jeune homme tel que toi
saura consoler ce douloureux cœur de mère.
J’ai été condamnée à souffrir
quand ma fille me fut ravie.
Avec elle tout mon bonheur est perdu.
Un scélérat l’a enlevée.
Je la vois encore trembler,
je vois son agitation apeurée,
son anxiété, son effroi
et ses timides efforts !
Il a fallu qu’on l’enlève sous mes yeux.
« Ah ! aidez-moi !» fut tout ce qu’elle dit,

mais ses plaintes étaient vaines,
car j’étais impuissante à l’aider.
Tu iras la délivrer,
tu sauveras ma fille,
et si je te vois vainqueur,
alors elle sera tienne pour toujours !
(Elle disparaît, suivie de ses Dames, tandis que le
tonnerre gronde encore. La scène s’éclaircit à
nouveau et Tamino, très étonné, est sur le point de
partir lorsque Papageno revient, lui montrant
tristement le cadenas qui lui clôt les lèvres.)


N°5 : Quintette

PAPAGENO
(montre tristement le cadenas)
Hem ! hem ! hem ! hem !

TAMINO
Le pauvre diable peut bien parler
de punition car le voilà muet !

PAPAGENO
Hem ! hem ! hem ! hem !

TAMINO
Je ne peux rien pour toi, sinon te plaindre,
car je ne suis pas de force à t’aider !

PREMIÈRE DAME
La Reine a pitié de toi et te
fait grâce de ta punition. –
(lui retire le cadenas de la bouche)

PAPAGENO
Maintenant Papageno peut de nouveau parler !

DEUXIÈME DAME
Parle si tu veux, mais ne mens plus !

PAPAGENO
Je ne mentirai plus jamais, non, non !

LES DAMES
Que ce cadenas te serve de leçon !

PAPAGENO
Ce cadenas me servira de leçon !

TOUS
Si tous les menteurs du monde avaient
un tel cadenas sur les lèvres,
au lieu de haine, calomnie et rancœur
régneraient l’amour et la fraternité.

PREMIÈRE DAME
Prince, accepte ce présent,
notre Reine te l’envoie.
(Elle donne à Tamino une flûte d’or.)
Cette flûte enchantée te protégera
et contre mauvaise fortune te soutiendra.

LES DAMES
Avec cette flûte, tu seras puissant,
tu pourras changer les passions humaines ;
le mélancolique deviendra joyeux
et le vieux garçon connaîtra l’amour.

TOUS
Ainsi une simple flûte

vaut plus qu’or et couronnes,
car grâce à elle s’accroissent
les joies et les plaisirs humains.

PAPAGENO
Et maintenant, belles dames, puis-je me retirer ?
Alors j’ai bien l’honneur de vous saluer.

LES DAMES
Tu peux, bien sûr, te retirer,
mais notre Reine a décidé
qu’avec le prince et sans tarder
tu devais te hâter au palais de Sarastro.

PAPAGENO
Non ! je vous remercie bien !
De votre propre aveu, je le sais,
Sarastro est pareil au tigre sauvage ;
sûrement, sans la moindre pitié,
il me ferait plumer, rôtir puis
donner aux chiens !

LES DAMES
Le prince te protègera, aie confiance en lui seul,
ainsi tu seras son serviteur.

PAPAGENO (à part)
Que le diable emporte le prince.
Ma vie m’est précieuse ;
mais voilà que, pour l’honneur,
elle s’enfuit de moi comme un voleur. –

PREMIÈRE DAME
(donne à Papageno un petit carillon)
Tiens, prends ce bijou, il est à toi.

PAPAGENO
Ah ! ah ! mais qu’est-ce donc ?

LES DAMES
Tu peux y entendre sonner des clochettes.

PAPAGENO
Et pourrai-je les faire jouer aussi ?

LES DAMES
Oh bien sûr ! oui, oui, bien sûr !

TOUS
Des clochettes d’argent, une flûte enchantée
à votre/notre protection sont utiles !
Adieu, nous partons,
adieu, jusqu’à ce que nous nous revoyons.
(Tous s’apprêtent à sortir.)

TAMINO
Mais, belles Dames, dites-nous...

PAPAGENO
... comment trouver ce palais ? –

TAMINO et PAPAGENO
... comment trouver ce palais ?

LES DAMES
Trois jeunes garçons, beaux, doux et sages,
vous apparaîtront au cours de votre voyage.
Ils seront vos guides ;
suivez leurs conseils et nul autre.

TAMINO et PAPAGENO
Trois jeunes garçons, beaux, doux et sages
nous apparaîtront au cours de notre voyage. –

LES DAMES
Ils seront vos guides ;
suivez leurs conseils et nul autre.

TAMINO et PAPAGENO
Adieu, nous partons,
adieu, adieu, jusqu’à ce que nous nous revoyons !

TOUS
Adieu, nous partons,
adieu, adieu, jusqu’à ce que nous nous revoyons !
(Changement de décor : une salle resplendissante
de style égyptien.)

(Deux esclaves apportent de riches coussins ainsi
qu’une table basse et des tapis. Monostatos entre
avec Pamina qui est traînée dans la pièce par des
esclaves.)


N°6 : Trio

MONOSTATOS
Entre donc, ma gentille colombe !

PAMINA
Ah quelle torture, quelle souffrance !

MONOSTATOS
C’en est fait de ta vie.

PAMINA
La mort ne m’effraye pas,
je n’ai de peine que pour ma mère,
elle en mourra de chagrin assurément.

MONOSTATOS
Eh ! mes esclaves ! enchaînez-la ;
ma haine sera ta perte !
(Ils lui mettent les fers.)

PAMINA
Ah ! laisse-moi plutôt mourir,
puisque rien, barbare ne peut te toucher.
(Elle tombe évanouie sur le sofa.)

MONOSTATOS
Et maintenant sortez !
Laissez-moi seul avec elle.
(Les esclaves se hâtent de sortir de la pièce.
Dehors, près de la fenêtre, Papageno passe inaperçu.)


PAPAGENO
Où suis-je donc ? Où puis-je bien être ?
Ah ! voilà du monde ! Hardi, je rentre.
(Il rentre.)
Ah ! belle et charmante jeune fille,
plus blanche même que la craie...
(Monostatos et Papageno s’aperçoivent, et chacun
s’effraie de la présence de l’autre..)


PAPAGENO et MONOSTATOS
Hou – – voici – le diable assurément.
Aie pitié ! – épargne-moi – Hou – Hou –
(Ils s’enfuient chacun d’un côté. Tandis que
Pamina reprend connaissance, Papageno revient
sur ses pas et la reconnaît. Il lui dit qu’un beau


prince l’aime et que sa mère a envoyé celui-ci pour
la délivrer. Pamina est heureuse, mais elle
s’apitoie alors sur le sort de l’oiseleur qui n’a pas
encore trouvé d’épouse.)


N°7 : Duo

PAMINA
Un homme qui ressent l’amour
ne peut manquer de bon cœur.

PAPAGENO
Partager le doux sentiment est alors
le premier devoir d’une femme.

ENSEMBLE
Nous voulons chanter la joie de l’amour,
nous vivons par l’amour seulement.

PAMINA
L’amour adoucit chaque peine,
toute la création se voue à l’amour.

PAPAGENO
Il donne du sel à chaque jour de notre vie
et fait tourner la roue de la nature.

ENSEMBLE
Son but le plus élevé, il le révèle clairement :
rien n’est plus noble que mari et femme.
Mari et femme et femme et mari
atteignent à la divinité.
(Ils sortent.)
(La scène se transforme en un bosquet. Tout au
fond se trouve un beau temple, sur lequel on peut
lire : « Temple de la Sagesse ». Ce temple conduit

par une colonnade, à deux autres temples ; celui
de droite porte l’inscription : « Temple de la
Raison », et celui de gauche « Temple de la Nature ».)

(Trois jeunes garçons, tenant chacun une palme
d’argent, amènent Tamino.)


N°8 : Finale

LES TROIS GARÇONS
Cette voie te conduira vers ton but,
mais il te faudra lutter comme un homme.
Écoute donc ce que nous avons à te dire :
Sois ferme, patient et silencieux ! –

TAMINO
Beaux enfants, dites-moi si
je pourrai délivrer Pamina ! –

LES GARÇONS
Nous ne pouvons te le dire.
Sois ferme, patient et silencieux.
Souviens-t’en. Bref, sois un homme !
Alors tu lutteras valeureusement.
(Ils sortent.)

TAMINO
Que les sages conseils de ces garçons
me soient à jamais gravés dans le cœur.
Où suis-je maintenant ? Qu’adviendra-t-il de moi ?
Est-ce ici le siège des dieux ?
Les portails l’annoncent, les colonnes le disent :
ici résident le travail, la sagesse et les arts.
Quand l’action règne, quand l’oisiveté est bannie,

le vice perd bientôt son empire.
Hardiment, je vais passer ce portail,
la vue en est noble, claire et pure.
Tremble maintenant, lâche scélérat,
car mon devoir est de délivrer Pamina !
(se dirige vers la porte de droite, l’ouvre et
s’apprête à entrer ; une voix retentit alors)


PREMIÈRE VOIX
Arrière !

TAMINO
Arrière ? Arrière ? – je vais donc tenter ma chance par là.
(Il s’approche de la porte de gauche.)

DEUXIÈME VOIX (de l’intérieur)
Arrière !

TAMINO
Ici aussi on crie « Arrière !»
(regardant autour de lui)
Mais je vois là une autre porte.
Peut-être trouverai-je ici l’entrée.
(Il frappe et un prêtre âgé paraît.)

L’ORATEUR
Où vas-tu, téméraire étranger ?
Que cherches-tu dans ce sanctuaire ?

TAMINO
Ce qui appartient à l’amour et à la vertu.

L’ORATEUR
Ces mots sont d’une haute portée,
mais comment espères-tu trouver ces biens ?
Ce ne sont pas l’amour et la vertu qui te

guident, mais la vengeance et la colère.

TAMINO
La colère contre ce scélérat seulement.

L’ORATEUR
Tu ne trouveras pas de scélérat chez nous.

TAMINO
Sarastro ne gouverne-t-il pas en ces lieux ?

L’ORATEUR
Oui, oui, Sarastro gouverne ici.

TAMINO
Mais non pas dans le Temple de la Sagesse ? –

L’ORATEUR
Il gouverne dans le Temple de la Sagesse ! –

TAMINO
Tout n’est donc qu’hypocrisie ! –

L’ORATEUR
Veux-tu donc déjà repartir ?

TAMINO
Oui, je veux partir, joyeux et libre –
et ne plus jamais voir vos temples ! –

L’ORATEUR
Explique mieux ton sentiment,
quelqu’imposture t’aura sans doute trompé ! –

TAMINO
Sarastro habite ici,
cela me suffit ! –

L’ORATEUR
Si tu tiens à la vie, parle, demeure ici ! –
Hais-tu donc Sarastro ?

TAMINO
Oui, je le hais à jamais ! –

L’ORATEUR
Eh bien, donne-moi tes raisons ! –

TAMINO
C’est un monstre, un tyran ! –

L’ORATEUR
As-tu la preuve de ce que tu dis là ?

TAMINO
Oui, une femme malheureuse en témoigne,
que le regret et la douleur accablent !

L’ORATEUR
Cette femme t’a donc trompé ? –
Les femmes agissent peu mais parlent beaucoup ;
es-tu donc dupe de leurs mensonges ? –
Ah ! si seulement Sarastro pouvait
te dire le pourquoi de ses actes. –

TAMINO
Il n’est que trop clair !
Ce voleur n’a-t-il pas sans pitié
arraché Pamina des bras de sa mère ? –

L’ORATEUR
Oui, Tamino, ce que tu dis est vrai ! –

TAMINO
Où est-elle donc, celle qui fut volée ?
Peut-être a-t-elle déjà été sacrifiée ? –

L’ORATEUR
Te le dévoiler, cher fils,
ne m’est pas encore permis. –

TAMINO
Éclaire cette énigme, ne me trompe pas !

L’ORATEUR
Le serment et le devoir me lient la langue !

TAMINO
Quand donc prendra fin ce mystère ? –

L’ORATEUR
Dès qu’une main amie t’aura conduit dans ce
sanctuaire pour y former des liens éternels.
(Il sort.)

TAMINO
Nuit éternelle, quand donc te dissiperas-tu ?
quand mes yeux verront-ils la lumière ? –

LES PRÊTRES (de l’intérieur)
Bientôt, mon fils, ou bien jamais !

TAMINO
Bientôt, dites-vous, ou jamais ? –
Vous qui demeurez invisibles, dites-moi,
Pamina respire-t-elle encore ? –

LES PRÊTRES
Oui, Pamina respire encore !

TAMINO
Elle vit, elle vit !
Je vous en remercie.
(sort sa flûte de sa poche)
Si seulement je pouvais,
Tout-Puissant, en votre honneur,
par mon jeu, vous dire ma reconnaissance,
telle qu’elle jaillit,
(posant la main sur sa poitrine)
de mon cœur !
(Il joue de la flûte. Toutes sortes d’animaux sauvages
s’avancent et l’écoutent. Il s’arrête de jouer et
ils s’en vont. Des oiseaux l’accompagnent de leurs chants.)

Qu’elle est puissante ta musique,
belle flûte, puisque ta mélodie
enchante même les animaux sauvages.
Mais seule Pamina reste éloignée.
Pamina, Pamina, entends-moi ! –
En vain, en vain ! –
Où ? où ? où ? Où, mais où te trouverai-je ? –
(On entend le pipeau de Papageno lui répondre.)
Ah ! voici l’appel de Papageno ! –
Peut-être a-t-il déjà vu Pamina ! –
Peut-être se hâtent-ils tous deux vers moi ! –
Ou bien son appel me guidera-t-il vers elle !
(Il sort.)

PAMINA et PAPAGENO
Pied agile, humeur audacieuse nous protègent
de la ruse et la colère de l’ennemi.
Si nous pouvions seulement trouver
Tamino sinon nous serons pris avant peu !

PAMINA
Beau jouvenceau ! –

PAPAGENO
Silence, silence, j’ai un meilleur moyen ! –
(Papageno joue de son pipeau. Tamino répond de
l’intérieur en jouant de la flûte.)


PAMINA et PAPAGENO
Y a-t-il une joie plus grande ?
Notre ami Tamino nous entend ;
le son de sa flûte est parvenu jusqu’à nous.
Quel bonheur de le retrouver,
mais que ce soit bientôt, que ce soit bientôt !
(Ils sont sur le point d’entrer.)

MONOSTATOS (se moquant d’eux)
Mais que ce soit bientôt...
Ah ! – je vous ai rattrapés à temps !
Qu’on m’apporte un poignard et des fers.
Attendez, je m’en vais vous apprendre à vivre !
Vous vouliez berner Monostatos ! –
Qu’on m’apporte des chaînes et des cordes.
Eh ! mes esclaves, venez-ici ! –

PAMINA et PAPAGENO
Hélas, c’en est fait de nous !

MONOSTATOS
Eh ! mes esclaves, venez-ici !
(Les esclaves apportent des chaînes.)

PAPAGENO
Qui sait oser, gagne souvent !
Allons, mon joli carillon,
laisse entendre tes clochettes
pour faire siffler leurs oreilles.
(Papageno joue de son carillon.)

MONOSTATOS et LES ESCLAVES
Il sonne si bien, sonne si joliment !
La ra la la la la ra la la la la ra la.
Jamais je n’ai rien vu ni entendu de semblable !
La ra la la la la ra la la la la ra la.
(s’éloignant en marchant)

PAMINA et PAPAGENO (riant)
Si tout brave homme
avait un tel carillon,
sans peine il ferait alors
fuir tous ses ennemis
et il vivrait tranquille,
avec tous en harmonie.
Car seule l’harmonie de l’amitié
adoucit toutes les peines,
et sans la sympathie
il n’est pas de bonheur sur terre.

LA COUR (de l’intérieur)
Vive Sarastro, que Sarastro vive !

PAPAGENO
Qu’y a-t-il donc ? Je frémis, je tremble ! –

PAMINA
Ô mon ami, maintenant c’en est fait de nous !
Voici que l’on annonce l’arrivée de Sarastro !

PAPAGENO
Oh ! que ne suis-je une souris,
je me cacherais si volontiers
et si j’étais aussi petit qu’un escargot,
je rentrerais vite dans ma maison ! –
Ah Pamina, que dirons-nous maintenant ? –

PAMINA
La vérité – la vérité, même si c’est un crime ! –
(Sarastro paraît, monté sur un char tiré par six
lions, et précédé de sa cour.)


LA COUR
Vive Sarastro, que Sarastro vive !
C’est ce à quoi nous nous consacrons avec joie !
Qu’il jouisse toujours de la vie comme un sage. –
Il est notre dieu et nous sommes ses fidèles.

PAMINA (s’agenouillant)
Seigneur, je suis coupable, il est vrai ! –
je voulais échapper à ta puissance. –
Mais la faute n’est pas la mienne !
Le Maure cruel exigeait mon amour,
c’est pourquoi, Seigneur, je te fuyais ! –

SARASTRO
Lève-toi et sois heureuse, mon enfant,
car je n’ai pas à te poser de questions
pour tout connaître de ton cœur ;
tu aimes tendrement un autre homme.
Je ne veux te contraindre à l’amour
et pourtant je ne te donne pas toute liberté.

PAMINA
Mon devoir filial m’appelle,
car ma mère –

SARASTRO
est en mon pouvoir ;
mais ton bonheur serait brisé
si je te laissais entre ses mains. –

PAMINA
Son nom résonne doucement à mes oreilles,
elle est ma mère – elle l’est –

SARASTRO
Et aussi une femme trop fière. –
Un homme doit guider ton cœur,
car sans un homme, une femme tend
à outrepasser ses limites.

MONOSTATOS
Et maintenant, téméraire garçon viens !
Voici Sarastro, notre maître ! –

PAMINA
C’est lui,

TAMINO
c’est elle,

PAMINA
je ne peux le croire,

TAMINO
c’est elle,

PAMINA
c’est lui.

TAMINO
ce n’est pas un rêve.

PAMINA et TAMINO
Que je te prenne dans mes bras,
même si je devais en mourir !
LA COUR
Que veut dire cela ?

MONOSTATOS
Voyez cette insolence !
Séparez-vous, c’en est trop !
(Monostatos les sépare. S’agenouillant devant
Sarastro)
Ton esclave est à tes pieds ;
que l’audacieux gredin expie son crime.
Vois combien le garçon est insolent !
Ce drôle d’oiseau voulait par la ruse
t’enlever Pamina,
moi seul ai su déjouer son projet.
Tu me connais ! – ma vigilance –

SARASTRO
mérite qu’on lui décerne des lauriers !
Donnez sans tarder à ce brave homme –

MONOSTATOS
Ta faveur déjà suffit à m’enrichir ! –

SARASTRO
seulement soixante-dix-sept coups de pied.

MONOSTATOS
Ah, mon maître, je n’attendais pas cette récompense.

SARASTRO
Ne me remercie pas, je ne fais que mon devoir !
(On emmène Monostatos.)

LA COUR
Vive Sarastro, le divin sage.
Avec équité il récompense et punit.

SARASTRO
Conduisez ces deux étrangers
dans le temple des épreuves,
couvrez-leur la tête –
car ils doivent d’abord être purifiés.
(Deux prêtres apportent une sorte de sac, dont ils
couvrent la tête des deux étrangers.)


LA COUR
Quand la vertu et la justice
sèment le Grand Sentier d’honneurs,
alors la terre est comme l’empire céleste
et les mortels sont les égaux des dieux.

libretto by Arlette de Grouchy 
Contents: Personnages; Premier Acte; Deuxième Acte

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