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“Roméo et Juliette” by Charles Gounod libretto (French English)
Juliette Capulet - soprano (soprano lyrique léger) Roméo Montaigu - ténor (ténor lyrique léger) Frère Laurent, ermite - basse Mercutio, ami de Roméo - baryton Benvolio, ami de Roméo - ténor Stéphano, page de Roméo - mezzo-soprano Le comte Capulet, père de Juliette - basse (baryton-basse) Gertrude, nourrice de Juliette - mezzo-soprano Tybalt, cousin de Juliette - ténor Le comte Pâris, fiancé de Juliette - baryton Grégorio, valet des Capulet - baryton Le duc de Vérone - basse Frère Jean - basse |
Juliette - soprano Roméo, son of Montaigu - tenor Frère Laurent - bass Mercutio, Romeo's friend - baritone Stéphano, Romeo's page - soprano, (trouser role) Count Capulet - bass Tybalt, Lady Capulet's nephew - tenor Gertrude, Juliet's nurse - mezzo-soprano The Duke - bass Pâris, a young count - baritone Grégorio, Capulet's servant - baritone Benvolio, Montague's nephew - tenor Frère Jean - bass Male and female retainers and kinsmen of the Houses of Capulet and Montague, maskers |
Ouverture PROLOGUE CHŒUR Vérone vit jadis deux familles rivales, Les Montaigus, les Capulets, De leurs guerres sans fin, à toutes deux fatales, Ensanglanter le seuil de ses palais. Comme un rayon vermeil brille en un ciel d’orage, Juliette parut, et Roméo l’aima ! Et tous deux, oubliant le nom qui les outrage, Un même amour les enflamma ! Sort funeste ! aveugles colères ! Ces malheureux amants payèrent de leurs jours La fin des haines séculaires Qui virent naître leurs amours ! |
Overture PROLOGUE CHORUS Verona, of old, saw two rival families, the Montagues and Capulets, in their endless feudings, fatal to them both, staining with blood the thresholds of their palaces. Like a rosy ray gleaming in a stormy sky, Juliet appeared, and Romeo loved her! And both of them, forgetting the name that outraged them, were fired by a selfsame love! Fatal destiny! Blind passions! These star-crossed lovers paid with their lives for the ending of the century-old hatreds that witnessed the birth of their love! |
Le Bal chez les Capulets (Une galerie splendidement illuminée, chez les Capulets, Seigneurs et Dames en dominos et masqués.) N°1 Introduction CHŒUR L’heure s’envole Joyeuse et folle, Au passage, il faut la saisir ! Cueillons les roses Pour nous écloses Dans la joie et dans le plaisir (les hommes) Chœur fantasque Des amours Sous le masque De velours, Ton empire Nous attire D’un sourire, D’un regard ! Et, complice, Le cœur glisse Au caprice Du hasard ! |
The Capulets’ Ball (A brilliantly lit gallery in the house of the Capulets. Lords and Ladies in dominoes, and masked.) No.1 Introduction CHORUS The hour flies past in wild merriment, we must seize it as it goes by! Let us gather the roses that have bloomed for us in joy and delight. (the Men) Fantastical chorus of love, behind the velvet mask your empire entices us with a smile, with a glance! And, a willing accomplice, the heart glides [hither and thither] at the whim of chance! |
(les femmes) Nuit d’ivresse ! Folle nuit ! L’on nous presse L’on nous suit ! Le moins tendre Va se rendre Et se prendre Dans nos rêts ! De la belle Qui l’appelle Tout révèle Les attraits ! ( Tous) L’heure s’envole, etc. (Tybalt et Pâris entrent en scène, leur masque à la main.) TYBALT Eh bien ! cher Pâris, que vous semble De la fête des Capulets ? PÂRIS Richesse et beauté tout ensemble Sont les hôtes de ce palais. TYBALT Vous n’en voyez pas la merveille, Le trésor unique et sans prix Qu’on destine à l’heureux Pâris, Le trésor unique qu’on destine à l’heureux Pâris. Regardez, regardez ! la voici, conduite par son père. (Capulet entre en scène conduisant Juliette par la main. À sa vue tout le monde se démasque). CAPULET Soyez les bienvenus, amis, dans ma maison ! À cette fête de famille La joie est de saison, la joie est de saison ! Pareil jour vit naître ma fille ! Mon cœur bat de plaisir encore en y songeant ! Mais excusez ma tendresse indiscrète ! (présentant Juliette) Voici ma Juliette ! Accueillez-la d’un regard indulgent. LES HOMMES (avec admiration) Ah ! qu’elle est belle ! Ah ! qu’elle est belle ! On dirait une fleur nouvelle Qui s’épanouit au matin ! |
(the Ladies) Night of madness! Night of rapture! They beset us, they pursue us! The least susceptible will surrender and be taken in our snares! Of the fair lady who invites him everything reveals the charms! (All) The hour flies past, etc. (Tybalt and Paris enter, carrying their masks.) TYBALT Well, dear Paris, what think you of the Capulets’ feast? PARIS Wealth and beauty conjoined are the guests of this palace. TYBALT You do not see its marvel, the unique and priceless treasure destined for the lucky Paris. The unique treasure destined for the lucky Paris. Look, look! Here she is, accompanied by her father. (Capulet enters leading Juliet by the hand. At sight of him, everyone unmasks.) CAPULET Be you welcome, friends, in my house! On this family occasion joy is in season, joy is in season! Just such a day as this saw the birth of my daughter! My heart still beats with pleasure when I think of it! But excuse my indiscreet show of affection! (presenting Juliet) This is my Juliet! Greet her with an indulgent eye. THE MEN (admiringly) Ah, how beautiful she is! Ah, how beautiful she is! You’d think her a flower new-bloomed at morning! |
LES FEMMES Ah ! qu’elle est belle ! Ah ! qu’elle est belle ! Elle semble porter en elle Toutes les faveurs du destin. TOUS Ah ! qu’elle est belle ! qu’elle est belle ! (On entend le prélude d’un air de danse.) JULIETTE Écoutez ! écoutez ! C’est le son des instruments joyeux Qui nous appelle et nous convie ! Ah ! – Tout un monde enchanté semble naître à mes yeux ! Tout me fête et m’enivre! Et mon âme ravie S’élance dans la vie Comme l’oiseau s’envole aux cieux ! CAPULET Allons ! jeunes gens ! Allons ! belles dames ! Aux plus diligents Ces yeux pleins de flammes ! Nargue, nargue des censeurs Qui grondent sans cesse ! Fêtez la jeunesse Et place aux danseurs ! Qui reste à sa place Et ne danse pas, De quelque disgrâce Fait l’aveu tout bas. Qui reste à sa place, etc. Ô regret extrême ! Quand j’étais moins vieux, Je guidais moi-même Vos ébats joyeux ! Les douces paroles Ne me coûtaient rien ! Que d’aveux frivoles Dont je me souviens ! Ô folles années Qu’emporte le temps ! Ô fleurs du printemps À jamais fânées ! Allons ! jeunes gens ! etc. Nargue ! nargue des censeurs ! etc. |
THE LADIES Ah, how beautiful she is! Ah, how beautiful she is! She seems to carry within her all the favours of destiny. ALL Ah, how beautiful she is! (The opening measures of a dance-tune are heard.) JULIET Hark, hark! ’Tis the sound of merry instruments that summons and invites us! Ah! – A whole enchanted world seems to rise up before my eyes! Everything bids me welcome. and elates me, and my delighted soul leaps forward into life as a bird wings off into the skies! CAPULET Come on, you young men! Come on, you fair ladies! To the most zealous these glowing eyes! A plague on the killjoys who endlessly chide! Give a welcome to youth and make way for the dancers! Who remains in his place and does not foot it, makes silent admission of some secret shame. Who remains in his place, etc. O utmost regret! When I was younger I myself used to lead your joyful revels! Soft words cost me nothing! What frivolous confessions I remember! O the wild years swept away by Time! O springtime flowers for ever faded! Come on, you young men! etc. A plague on the killjoys! etc. |
CHŒUR Nargue ! nargue des censeurs Qui grondent sans cesse ! Fêtons la jeunesse ! Et place aux danseurs ! ( Tout le monde s’éloigne et circule dans les galeries voisines. Juliette sort au bras de Pâris. Capulet et Tybalt les suivent en causant. Roméo et Mercutio paraissent avec leurs amis). MERCUTIO Enfin la place est libre, amis ! Pour un instant qu’il soit permis D’ôter son masque. ROMÉO Non !... non ! vous l’avez promis ; Soyons prudents ! Ici nul ne doit nous connaître Quittons cette maison sans en braver le maître. MERCUTIO Bah ! Si les Capulets sont gens à se fâcher, C’est lâcheté de nous cacher. (frappant sur son épée) Car nous avons tous là de quoi leur tenir tête ! (avec le chœur) Oui, nous avons tous là de quoi leur tenir tête ! ROMÉO Mieux eût valu ne pas nous mêler à la fête ! MERCUTIO Pourquoi ? ROMÉO (mystérieusement) J’ai fait un rêve ! MERCUTIO (avec une frayeur comique) Ô présage alarmant ! La reine Mab t’a visité ! ROMÉO (étonné) Comment ? |
CHORUS A plague on the killjoys who endlessly chide! Let’s give welcome to youth and make way for the dancers! (Everyone withdraws and circulates in the adjoining galleries. Juliet goes out on Paris’s arm, followed by Capulet and Tybalt, chatting together. Romeo and Mercutio appear with their friends.) MERCUTIO At last we’re alone, friends! Allow us, if you will, to unmask for a moment. ROMEO No!...No! You gave your promise; let us be cautious! Here no one must recognise us! Let’s leave this house without confronting the master. MERCUTIO Bah! If the Capulets are fellows to take offence ’tis cowardice to conceal ourselves. (tapping his sword) For we all have something here that’ll take care of them! (with chorus) Yes, we all have something here that’ll take care of them! ROMEO It might have been better not to involve ourselves in the festivities! MERCUTIO Why? ROMEO (mysteriously) I have dreamed a dream! MERCUTIO (in a comic show of terror) O alarming portent! Queen Mab has been with you! ROMEO (startled) What?... |
N°2 Ballade de la reine Mab MERCUTIO Mab, la reine des mensonges, Préside aux songes ; Plus légère que le vent Décevant ; À travers l’espace, À travers la nuit, Elle passe, Elle fuit ! Son char, que l’atome rapide Entraîne dans l’éther limpide, Fut fait d’une noisette vide Par ver de terre, le charron ! Les harnais, subtile dentelle, Ont été découpés dans l’aile De quelque verte sauterelle Par son cocher, le moucheron ! Un os de grillon sert de manche À son fouet, dont la mèche blanche Est prise au rayon qui s’épanche De Phœbé rassemblant sa cour! Chaque nuit, dans cet équipage, Mab visite, sur son passage, L’époux qui rêve de veuvage Et l’amant qui rêve d’amour ! À son approche, la coquette Rêve d’atours et de toilettes, Le courtisan fait la courbette, Le poète rime ses vers ! À l’avare, en son gîte sombre, Elle ouvre des trésors sans nombre, Et la liberté rit dans l’ombre Au prisonnier chargé de fers, Le soldat rêve d’embuscades, De batailles et d’estocades, Elle lui verse les rasades Dont ses lauriers sont arrosés. Et toi qu’un soupir effarouche, Quand tu reposes sur ta couche, Ô vierge ! elle effleure ta bouche, Et te fait rêver de baisers ! Mab, la reine des mensonges, etc. |
No.2 Ballad of Queen Mab MERCUTIO Mab, queen of illusions, presides over dreams; more fickle than the deceiving wind; through space, through the night, she passes and is gone! Her chariot, drawn through the limpid ether by swift atomies was made from an empty nutshell – an earthworm was the cartwright! The harness, a delicate lacework, has been cut from the wing of some green grasshopper by her coachman, a gnat! A cricket’s bone serves as the handle of her whip, whose white lash is fashioned from a moonbeam shed by Phoebe assembling her court! Nightly in this equipage Mab visits, on her rounds, the husband dreaming of widowerhood and the lover dreaming of love! At her approach the coquette dreams of finery and dresses, the courtier bows and scrapes, the poet rhymes his verse! To the miser in his gloomy lodging she discovers treasures without number, and freedom smiles in the dark at the prisoner loaded with chains. The soldier dreams of ambuscadoes, of battles and surprise attacks, she pours out for him the bumpers of wine with which his laurels are sprinkled. And you, o virgin whom a sigh startles, as you lie abed she lightly touches your lips and makes you dream kisses! Mab, queen of illusions, etc. |
N°2a Récitatif et scène ROMÉO Eh bien !... que l’avertissement Me vienne de Mab ou d’un autre, Sous ce toit qui n’est point le nôtre Je me sens attristé d’un noir pressentiment ! MERCUTIO (en badinant) Ta tristesse, je le devine, Est de ne point trouver ici la Rosaline ; Cent autres, dans le bal, te feront oublier Ton fol amour d’écolier ! Viens ! ROMÉO (regardant au dehors) Ah ! voyez ! MERCUTIO Qu’est-ce donc ? ROMÉO Cette beauté céleste Qui semble un rayon dans la nuit ! MERCUTIO Le porte-respect qui la suit Est d’une beauté plus modeste ! ROMÉO (avec passion) Ô trésor digne des cieux ! Quelle clarté soudaine a dessillé mes yeux ? Je ne connaissais pas la beauté véritable ! Ai-je aimé jusqu’ici ? ai-je aimé ?... MERCUTIO (en riant, à Benvolio et aux autres jeunes gens) Bon ! Voilà Rosaline au diable ! Et nous avions prévu ceci ! AMIS DE ROMÉO Nous avions prévu ceci ! MERCUTIO On la congédie Sans plus de souci, Et la comédie Se termine ainsi ! AMIS DE ROMÉO On la congédie, etc. |
No.2a Recitative and Scene ROMEO Well!...whether the warning comes to me from Mab or another, beneath this roof which is not our own I feel troubled by a black presentiment! MERCUTIO (teasing him) Your melancholy, as I devise, comes from not finding your Rosaline here; a hundred others at the ball will make you forget your mad schoolboy love! Come along! ROMEO (glancing outside) Ah! look! MERCUTIO What now? ROMEO This celestial beauty who seems like a sunbeam in the night! MERCUTIO The imposing dame with her is of more modest beauty... ROMEO (passionately) O treasure worthy of the heavens! What sudden light has opened my eyes! I did not know true beauty! Did I love till now? Did I love?... MERCUTIO (laughing, to Benvolio and the other young men) Good! So to the devil with Rosaline! And – we had foreseen this! ROMEO’S FRIENDS We had foreseen this! MERCUTIO She’s been dismissed without further concern, and thus the comedy comes to an end! ROMEO’S FRIENDS She’s been dismissed, etc. |
(Mercutio entraîne Roméo, au moment où paraît Juliette suivie de Gertrude). JULIETTE Voyons, Nourrice, on m’attend ! Parle vite ! GERTRUDE Respirez un moment ! (avec malice) Est-ce moi qu’on évite Ou le comte Pâris que l’on cherche ? JULIETTE (négligemment) Pâris ? GERTRUDE Vous aurez là, dit-on, La perle des maris. JULIETTE (riant) Ah ! ah ! Je songe bien vraiment au mariage. GERTRUDE Par ma vertu ! j’étais mariée à votre âge ! JULIETTE Non ! non ! je ne veux pas t’écouter plus longtemps : Laisse mon âme à son printemps ! |
(Mercutio hurries Romeo away, just as Juliet appears, attended by Gertrude.) JULIET See, nurse, they’re waiting for me! Speak quickly! GERTRUDE Draw breath a moment! (maliciously) Is somebody dodging me, or is it Count Paris she’s looking for? JULIET (offhandedly) Paris? GERTRUDE You will have in him, they say, a pearl among husbands. JULIET (laughing) Ha! ha! Truly I do think of marriage. GERTRUDE By my virtue, I was married at your age! JULIET No, no! – I’ll not listen to you any longer – leave my heart to its springtime! |
N°3 Ariette JULIETTE Ah ! – Je veux vivre Dans le rêve qui m’enivre ; Ce jour encor, Douce flamme, Je te garde dans mon âme Comme un trésor ! Je veux vivre, etc. Cette ivresse De jeunesse Ne dure, hélas ! qu’un jour ! Puis vient l’heure Où l’on pleure, Le cœur cède à l’amour Et le bonheur fuit sans retour. Ah ! – Je veux vivre, etc. Loin de l’hiver morose Laisse-moi sommeiller Et respirer la rose, Respirer la rose Avant de l’effeuiller. Ah ! – Ah ! – Ah ! – Douce flamme, Reste dans mon âme Comme un doux trésor Longtemps encor ! Ah ! – Comme un trésor Longtemps encor ! |
No.3 Arietta JULIET Ah! – I want to live in this intoxicating dream! This day still, gentle flame, I keep you in my heart like a treasure! I want to live, etc. This intoxication of youth alas! lasts but a day! Then comes the time when one weeps, the heart surrenders to love and happiness flies off for ever! Ah! – I want to live, etc. Far from sullen winter let me slumber and breathe the rose, breathe the rose before despoiling it. Ah! – Ah! – Ah! – Gentle flame, stay in my heart like a sweet treasure for a long while yet. Ah! – like a treasure for a long while yet! |
N°3a Récitatif (Grégorio paraît au fond et rencontre Roméo). ROMÉO (à Grégorio, en lui montrant Juliette) Le nom de cette belle enfant ? GRÉGORIO Vous l’ignorez ? C’est Gertrude. GERTRUDE (se retournant) Plaît-il ? GRÉGORIO (à Gertrude) Très gracieuse dame ! Pour les soins du souper, je crois qu’on vous réclame. GERTRUDE (avec impatience) C’est bien ! me voici ! JULIETTE Va ! (Gertrude sort avec Grégorio, Roméo arrête Juliette au moment où elle va sortir). ROMÉO De grâce, demeurez ! |
No.3a Recitative (Gregorio appears at the back and encounters Romeo.) ROMEO (to Gregorio, pointing out Juliet to him) The name of this fair child? GREGORIO Know you not? It is Gertrude. GERTRUDE (turning round) What’s that? GREGORIO (to Gertrude) Most gracious lady! I think they require you to attend to the supper. GERTRUDE (impatiently) Very well! Here I am! JULIET Go! (Gertrude goes out with Gregorio. Romeo stops Juliet just as she is leaving.) ROMEO For pity’s sake, stay! |
N°4 Madrigal (à deux voix) ROMÉO Ange adorable, Ma main coupable Profane, en l’osant toucher, La main divine Dont j’imagine Que nul n’a droit d’approcher ! Voilà, je pense, La pénitence Qu’il convient de m’imposer. C’est que j’efface L’indigne trace De ma main par un baiser ! JULIETTE Calmez vos craintes ! À ces étreintes Du pèlerin prosterné, Les saintes même, Pourvu qu’il aime, Ont d’avance pardonné ; (Elle retire sa main.) Mais à sa bouche La main qu’il touche Prudemment doit refuser Cette caresse Enchanteresse Qu’il implore en un baiser ! ROMÉO Les saintes ont pourtant une bouche vermeille... JULIETTE Pour prier seulement ! ROMÉO N’entendent-elles pas la voix qui leur conseille Un arrêt plus clément ? JULIETTE Aux prières d’amour leur cœur reste insensible, Même en les exauçant ! ROMÉO Exaucez donc mes vœux, et gardez impassible Votre front rougissant. (Il baise la main de Juliette.) |
No.4 Madrigal (for two voices) ROMEO Adorable angel, my guilty hand profanes, by daring to touch it, the divine hand which I imagine no one has the right to approach! Here, I think, is the penance proper to impose on me – it is that I efface the unworthy trace of my hand by a kiss! JULIET Calm your fears! These handclaspings of the pilgrim on his knees even the saints – provided that he loves – have pardoned in advance; (She withdraws her hand.) but the hand that he touches to his lips ought prudently to refuse that enchanting caress he implores in a kiss! ROMEO Yet the saints have rosy lips... JULIET Only for praying with! ROMEO Do they not hear the voice whichcounsels them a more merciful decree? JULIET Their hearts remain unmoved by the prayers of love even as they grant them. ROMEO Then do you grant mine, and keep unmoved your blushing face. (He kisses Juliet’s hand.) |
JULIETTE (souriant) Ah ! Je n’ai pu m’en défendre ! J’ai pris le péché pour moi ! ROMÉO Pour apaiser votre émoi, Vous plaît-il de me le rendre ? JULIETTE Non ! je l’ai pris ! laissez-le moi ! ROMÉO Vous l’avez pris ! rendez-le moi ! JULIETTE Non ! je l’ai pris ! laissez-le moi ! etc. ROMÉO Vous l’avez pris ! rendez-le moi ! etc. |
JULIET (smiling) Ah! I could not help it! I have taken the sin upon myself! ROMEO To allay your anxiety would you like to give it back to me? JULIET No! I have taken it! Leave it with me! ROMEO You have taken it away! Give me back my sin! JULIET No! I have taken it! Leave it with me! etc. ROMEO You have taken it away! Give me back my sin! etc. |
N°5 Finale ROMÉO Quelqu’un ! (Il remet son masque.) JULIETTE C’est mon cousin Tybalt. ROMÉO Eh ! quoi ! vous êtes ?... JULIETTE La fille du seigneur Capulet. ROMÉO (à part) Dieu ! TYBALT (s’avançant) Pardon, Cousine !... Nos amis déserteront nos fêtes, Si vous fuyez ainsi leurs regards ! Venez donc ! Venez donc ! (bas) Quel est ce beau galant qui s’est masqué si vite en me voyant venir ? JULIETTE Je ne sais ! TYBALT (avec défiance) On dirait qu’il m’évite ! ROMÉO Dieu vous garde, seigneur ! (Il sort.) TYBALT Ah ! je le reconnais à sa voix !... à ma haine ! C’est lui ! c’est Roméo ! |
No.5 Finale ROMEO Someone comes! (He replaces his mask.) JULIET It’s my cousin Tybalt. ROMEO Ah! what’s this? You are... JULIET My lord Capulet’s daughter. ROMEO (aside) God! TYBALT (coming forward) Your pardon, coz!... Our friends will desert our festivities if you shun them like this! Come then! Come then! (under his breath) Who is this fine gallant who so quickly masked himself when he saw me coming? JULIET I know not! TYBALT (scornfully) You’d say he’s avoiding me! ROMEO God keep you, sir. (He goes out.) TYBALT Ah! I recognise him by his voice!... by my hatred! It’s he! It’s Romeo! |
JULIETTE (avec effroi) Roméo ! TYBALT Sur l’honneur Je punirai le traître et sa mort est certaine ! (Il sort.) JULIETTE (avec terreur) C’était Roméo ! (absorbée et le regard fixe) Ah ! Je l’ai vu trop tôt sans le connaître ! La haine est le berceau de cet amour fatal ! C’en est fait ! Si je ne puis être à lui, Que le cercueil soit mon lit nuptial ! (Elle s’éloigne lentement : les invités reparaissent – Tybalt entre d’un côté avec Pâris, Mercutio, Benvolio et leurs amis masqués entrent de l’autre.) TYBALT (apercevant Roméo) Le voici ! le voici ! PÂRIS (abordant Tybalt) Qu’est-ce donc ? TYBALT (lui montrant Roméo) Roméo !!! PÂRIS Roméo ! (Tybalt va pour s’élancer vers le groupe : Capulet, d’un geste impérieux, lui impose silence.) ROMÉO (à part). Mon nom même Est un crime à ses yeux ! Ô douleur ! ô douleur ! Capulet est son père et je l’aime ! MERCUTIO (à Roméo) Voyez ! voyez de quel air furieux Tybalt nous regarde ! Un orage est dans l’air ! TYBALT Je tremble de rage ! |
JULIET (with consternation) Romeo! TYBALT ’Pon my honour, I shall punish the traitor and his death is certain! (He goes out.) JULIET (terrified) It was Romeo! (absorbed and staring fixedly) Ah, too early seen unknown! Hatred is the cradle of this fatal love! It is all over! If I may not be his, let the grave be my wedding-bed! (She goes out slowly: the guests begin to drift back. – Tybalt comes in from one side with Paris. Romeo, Mercutio, Benvolio and their friends, masked, enter from the other.) TYBALT (catching sight of Romeo) Here he is! Here he is! PARIS (coming up with Tybalt) What is it? TYBALT (indicating Romeo) Romeo!!! PARIS Romeo! (Tybalt moves as though to rush upon the group; Capulet, with an imperious gesture, enjoins silence upon him.) ROMEO (aside) My very name is a crime in her eyes! O the pain of it! Capulet is her father, and I love her! MERCUTIO (to Romeo) See! See what a furious look Tybalt turns upon us! A storm is in the air! TYBALT I’m shaking with rage! |
CAPULET (à ses invités) Quoi ! partez-vous déjà ? demeurez un instant ! Un souper joyeux vous attend ! TYBALT Patience ! patience ! De cette mortelle offense Roméo, j’en fais serment, Subira le châtiment ! MERCUTIO On nous observe, silence ! Il faut user de prudence ! N’attendons pas follement Un funeste événement. CAPULET (à ses invités) Que la fête recommence ! Que l’on boive et que l’on danse ! Autrefois, j’en fais serment, Nous dansions plus vaillamment ! Nous dansions, etc. CHŒUR Que la fête recommence ! Que l’on boive et que l’on danse ! Le plaisir n’a qu’un moment ! Terminons la nuit gaiement ! Le plaisir, etc. (Mercutio entraîne Roméo : ils sont suivis de Benvolio et de leurs amis.) |
CAPULET (to his guests) What! You are going already? Stay awhile! Stay awhile! A trifling foolish banquet is towards! TYBALT Patience! give me patience! For this mortal insult Romeo, I swear, shall suffer punishment! MERCUTIO We’re being watched, keep quiet! We must use caution! Let’s not foolishly wait for something disastrous to happen. CAPULET (to his guests) Let the festivities proceed! Let us all drink and dance! In the old days, I vow, we danced more bravely! We danced, etc. CHORUS Let the festivities proceed! Let us all drink and dance! Pleasure is fleeting! Let us end the night gaily! Pleasure, etc. (Mercutio hurries Romeo away; they are followed by Benvolio and their friends.) |
Le Jardin de Juliette (Un jardin – À gauche un pavillon habité par Juliette. – Au premier étage, une fenêtre avec balcon – Au fond, une balustrade dominant d’autres jardins.) N°6 Entr’acte et chœur (Stéphano, appuyé contre la balustrade du fond, tient une échelle de corde et aide Roméo à escalader la balustrade ; puis il se retire en emportant l’échelle.) ROMÉO (seul) Ô nuit ! sous tes ailes obscures Abrite-moi ! MERCUTIO (appelant du dehors) Roméo ! Roméo ! ROMÉO C’est la voix de Mercutio ! Celui-là se rit des blessures Qui n’en reçut jamais ! CHŒUR (Mercutio, Benvolio et leurs amis) Mystérieux et sombre, Roméo ne nous entend pas ! L’amour se plaît dans l’ombre ; Puisse l’amour guider ses pas ! (Les voix s’éloignent.) |
Juliet’s garden (A garden – On the left the apartments occupied by Juliet. – On the first floor a window with a balcony. – In the background a balustrade overlooking other gardens.) No.6 Entr’acte and Chorus (Stephano, leaning against the balustrade at the back, holds a rope ladder and helps Romeo to scale the balustrade; then he withdraws, taking the ladder with him.) ROMEO (alone) O night, shelter me beneath thy dark wings! MERCUTIO (calling from outside) Romeo! Romeo! ROMEO It’s Mercutio’s voice! He jests at scars that never felt a wound! CHORUS (Mercutio, Benvolio and their friends) Mysterious and gloomy, Romeo does not hear us! Love delights in the darkness; May love guide his steps! (The voices die away in the distance.) |
N°7 Cavatine ROMÉO L’amour, l’amour ! Oui, son ardeur a troublé tout mon être ! (La fenêtre de Juliette s’éclaire.) Mais quelle soudaine clarté Resplendit à cette fenêtre ? C’est là que dans la nuit rayonne sa beauté ! Ah ! lève-toi, soleil ! fais pâlir les étoiles Qui, dans l’azur sans voiles, Brillent au firmament, Ah ! lève-toi ! parais ! parais ! Astre pur et charmant ! Elle rêve ! elle dénoue Une boucle de cheveux Qui vient caresser sa joue. Amour ! Amour ! porte-lui mes vœux ! Elle parle ! Qu’elle est belle ! Ah ! Je n’ai rien entendu ! Mais ses yeux parlent pour elle, Et mon cœur a répondu ! Ah ! lève-toi, soleil ! fais pâlir les étoiles, etc. ... Viens ! parais ! |
No.7 Cavatina ROMEO Love! Love! Ay, its intensity has disturbed my very being! (A light comes on in Juliet’s window.) But what sudden light through yonder window breaks? ’Tis there that by night her beauty shines! Ah, arise, o sun! Turn pale the stars that, unveiled in the azure, do sparkle in the firmament. Ah, arise! Ah, arise! Appear! Appear, thou pure and enchanting star! She is dreaming, she loosens a lock of hair which falls to caress her cheek. Love! Love, carry my vows to her! She speaks! How beautiful she is! Ah, I heard nothing. But her eyes speak for her and my heart has answered! Ah, arise, o sun! turn pale the stars, etc. ...come thou, appear! |
N°8 Scène et chœurs (La fenêtre s’ouvre, Juliette paraît sur le balcon, et s’appuie d’un air mélancolique.) JULIETTE Hélas : moi, le haïr ! haine aveugle et barbare ! Ô Roméo, pourquoi ce nom est-il le tien ? Abjure-le, ce nom fatal qui nous sépare, Ou j’abjure le mien. ROMÉO (s’avançant) Est-il vrai ? L’as-tu-dit ? Ah ! dissipe le doute D’un cœur trop heureux ! JULIETTE Qui m’écoute Et surprend mes secrets dans l’ombre de la nuit ? ROMÉO Je n’ose, en me nommant, te dire qui je suis ! JULIETTE N’es-tu pas Roméo ? ROMÉO Non ! je ne veux plus l’être Si ce nom détesté me sépare de toi ! Pour t’aimer, laisse-moi renaître Dans un autre que moi ! |
No.8 Scene and Choruses (The window opens. Juliet appears on the balcony, and leans upon it dejectedly.) JULIET Alas! I – to hate him! Blind, cruel hatred! O Romeo, wherefore art thou Romeo? Refuse that fatal name which divides us or I’ll refuse mine. ROMEO (coming forward) Is it true? Did you say it? Ah, dispel the doubt in a too happy heart! JULIET Who listens to me and surprises my secrets in the darkness of night? ROMEO I dare not, by naming myself, tell you who I am. JULIET Are you not Romeo? ROMEO No! I’ll no longer be he if this detested name keeps us apart! That I may love you, let me be born again in some other self than mine! |
JULIETTE Ah ! – tu sais que la nuit te cache mon visage ! Tu le sais ! Si tes yeux en voyaient la rougeur Elle te rendrait témoignage De la pureté de mon cœur ! Adieu les vains détours... m’aimes-tu ? Je devine Ce que tu répondras. Ne fais pas de serments ! Phœbé, de ses rayons inconstants, j’imagine, Éclaire le parjure et se rit des amants ! Cher Roméo ! dis-moi loyalement : je t’aime ! Et je te crois ! Et mon honneur Se fie au tien, ô mon seigneur, Comme tu peux te fier à moi-même ! N’accuse pas mon cœur, dont tu sais le secret, D’être léger, pour n’avoir pu se taire... Mais accuse la nuit dont le voile indiscret A trahi le mystère. ROMÉO (avec feu) Devant Dieu qui m’entend, Je t’engage ma foi ! JULIETTE Écoute !... on vient !... silence !... Éloigne-toi ! (Grégorio et les valets entrent en scène avec des lanternes sourdes à la main.) GRÉGORIO, LES VALETS Personne ! personne ! Le page aura fui !... Au diable on le donne, Le diable est pour lui ! Au diable on le donne, etc. Le fourbe ! le traître Attendait son maître ! Le destin jaloux L’arrache à nos coups ; Et demain peut-être Il rira de nous ! Et demain peut-être, etc. Le fourbe ! le traître ! etc. Personne ! personne ! Le page aura fui ! etc. |
JULIET Ah! – you know that the night hides my face from you! You know it! If your eyes could see its blushes they would bear witness to you of the purity of my heart! Away with useless evasions...do you love me? I can guess what you will answer: but make no promises! Phoebe, I fancy, with her inconstant rays lights up false oaths and laughs at lovers! Dear Romeo! Tell me honestly “I love you!” and I’ll believe you; and my honour will entrust itself to yours, o my lord, as you can trust in me! Do not accuse my heart, whose secret you know, of wantonness, because it could not keep silent... but accuse the night whose indiscreet veil has betrayed the mystery. ROMEO (ardently) Before God who hears me. I pledge you my troth! JULIET Hark!...someone comes...peace!... be gone! (Gregorio and the servants enter carrying dark lanterns.) GREGORIO, THE SERVANTS No-one’s here! No-one’s here! The page must have fled!... The devil can have him! The devil’s for him! The devil can have him. etc. The knave, the traitor was waiting for his master! Jealous destiny snatches him from our blows, and tomorrow perhaps he will laugh at us! And tomorrow perhaps, etc. The knave! The traitor! etc. No-one’s here! No-one’s here! The page must have fled! etc. |
GERTRUDE (entrant en scène) De qui parlez-vous donc ? GRÉGORIO D’un page Des Montaigus !... Maître et valet En passant notre seuil, ont osé faire outrage Au seigneur Capulet ! GERTRUDE Vous moquez-vous ? GRÉGORIO Non ! sur ma tête ! Un des Montaigus s’est permis De venir avec ses amis À notre fête ! GERTRUDE Un Montaigu ?... GRÉGORIO Un Montaigu. CHŒUR (avec malice) Est-ce pour vos beaux yeux que le traître est venu ? GERTRUDE Qu’il vienne encore ! et, sur ma tête, Je vous le ferai marcher droit, Si droit, qu’il n’aura pas envie De recommencer ! |
GERTRUDE (entering) Whoever are you talking about? GREGORIO A page of the Montagues!...Master and servant by crossing our threshold have dared to offer insult to my lord Capulet! GERTRUDE You’re jesting? GREGORIO No, by my head! One of the Montagues has allowed himself to come with his friends to our feast! GERTRUDE A Montague?... GREGORIO A Montague. CHORUS (maliciously) Is it for the sake of your pretty face that the traitor has come? GERTRUDE Let him come back! And upon my head I’ll send him packing so smartly for you that he’ll have no desire to try it again! |
GRÉGORIO On vous croit ! CHŒUR (riant) Pour cela, nourrice, on vous croit ! Bonne nuit, charmante nourrice, Joignez la grâce à vos vertus ! Que le ciel vous bénisse Et confonde les Montaigus ! (Grégorio et les valets s’éloignent.) GERTRUDE Béni soit le bâton qui tôt ou tard me venge de ces coquins ! JULIETTE (paraissant sur le seuil du pavillon) C’est toi, Gertrude ? GERTRUDE Oui, mon bel ange ! À cette heure comment ne reposez-vous pas ? JULIETTE Je t’attendais ! GERTRUDE Rentrons ! JULIETTE Ne gronde pas ! (Elle jette un regard autour d’elle, et rentre dans le pavillon suivie de Gertrude, Roméo reparaît.) |
GREGORIO We believe you! CHORUS (laughing) As for that, nurse, we believe you! Goodnight, charming nurse, add forgiveness to your virtues! May Heaven bless you and confound the Montagues! (Gregorio and the servants withdraw.) GERTRUDE Blessed be the cudgel that sooner or later avenges me on these rascals! JULIET (appearing in the doorway of her apartments) Is it you, Gertrude? GERTRUDE Yes, my pretty angel! Why are you not abed at this hour? JULIET I was waiting for you! GERTRUDE Come on in! JULIET Don’t scold! (She glances round about her, and goes back into her apartments followed by Gertrude. Romeo reappears.) |
N°9 Duo ROMÉO Ô nuit divine ! Je t’implore ! Laisse mon cœur à ce rêve enchanté ! Je crains de m’éveiller et n’ose croire encore à sa réalité ! JULIETTE (reparaissant sur le seuil du pavillon, à demi-voix) Roméo ! ROMÉO (se retournant) Douce amie ! JULIETTE (l’arrêtant du geste et toujours sur le seuil) Un seul mot... puis adieu ! Quelqu’un ira demain vous trouver ! (solennellement) Sur ton âme, Si tu me veux pour femme, Fais-moi dire quel jour, à quelle heure, en quel lieu, Sous le regard de Dieu, notre union sera bénie ! Alors, ô mon seigneur, sois mon unique loi ! Je te livre ma vie entière, Et je renie Tout ce qui n’est pas toi ! Mais !... Si ta tendresse Ne veut de moi que de folles amours... Ah ! je t’en conjure alors, par cette heure d’ivresse, Ne me revois plus ! ne me revois plus ! Et me laisse à la douleur, Qui remplira mes jours. |
No.9 Duet ROMEO O divine night, I implore you! Leave my heart to its enchanted dream! I fear to awaken and still dare not believe in its reality! JULIET (reappearing in the doorway of her apartment, in an undertone) Romeo! ROMEO (turning) Sweet love! JULIET (stopping him with a gesture, and remaining in the doorway) One word only...then farewell! Tomorrow someone will come to find you! (solemnly) Upon your soul. if you want me as your wife send word to me what day, at what hour, in what place our union may be blessed in the sight of God! Then, o my lord, be my sole law! To you will I yield up my whole life, and I’ll renounce all that is not you! But...if all your love intends is to trifle with me... ah, then I beg you by this hour of rapturous delight, see me no more, see me no more and leave me to the grief which will fill my days. |
ROMÉO (à genoux devant Juliette) Ah ! je te l’ai dit, je t’adore ! Dissipe ma nuit ! sois l’aurore Où va mon cœur, où vont mes yeux ! Dispose en reine, dispose de ma vie, Verse à mon âme inassouvie, Toute la lumière des cieux ! GERTRUDE (au dehors) Juliette ! JULIETTE On m’appelle ! ROMÉO (se relevant et saisissant la main de Juliette) Ah ! déjà ! JULIETTE Pars ! Je tremble Que l’on nous voie ensemble ! GERTRUDE (parlé) Juliette ! |
ROMEO (on his knees before Juliet) Ah, I have told you I adore you! Dispel my night! Be the dawn, to which my heart and eyes turn! Queenlike, dispose of my life, pour into my unsatisfied soul all the light of the heavens! GERTRUDE (outside) Juliet! JULIET Someone calls me! ROMEO (rising to his feet and seizing Juliet’s hand) Ah, already! JULIET Begone! I am terrified that someone may see us together! GERTRUDE (spoken) Juliet! |
JULIETTE Je viens... ROMÉO Écoute-moi ! JULIETTE Plus bas ! ROMÉO (attirant Juliette à lui et l’amenant en scène) ... Non, non, on ne t’appelle pas ! JULIETTE Plus bas ! plus bas ! parle plus bas ! ROMÉO Ah ! ne fuis pas encore ! Laisse ma main s’oublier dans ta main ! JULIETTE Ah ! l’on peut nous surprendre ! Laisse ma main s’échapper de ta main ! Adieu ! ROMÉO Adieu ! JULIETTE Adieu ! ROMÉO, JULIETTE Adieu ! De cet adieu si douce est la tristesse Que je voudrais te dire adieu jusqu’à demain ! De cet adieu, etc. JULIETTE Maintenant, je t’en supplie, pars ! ROMÉO Ah ! cruelle ! JULIETTE Pourquoi te rappelais-je ? ô folie ! À peine es-tu près de moi, Que soudain mon cœur l’oublie ! Je te voudrais parti ! |
JULIET I’m coming... ROMEO Listen to me! JULIET Softer! ROMEO (drawing Juliet to him and leading her forward) ...No, no, no-one calls you! JULIET Softer! Softer! Speak softer! ROMEO Ah, do not go yet! Let my hand forget itself in yours! JULIET Ah, someone might surprise us! Let my hand slip from yours! Goodnight! ROMEO Goodnight! JULIET Goodnight! ROMEO, JULIET Goodnight! Parting is such sweet sorrow that I would say goodnight till it be tomorrow! Parting, etc. JULIET My belov’d, I now implore thee, go! ROMEO Ah! how cruel! JULIET But why did I recall thee? O, my folly! For hardly art thou return’d than my heart forgets it wholly! I would, thou wert gone! |
Pas trop loin cependant Comme un oiseau captif Que la main d’un enfant Tient enchaîné d’un fil de soie, À peine vole-t-il dans l’espace emporté, Que l’enfant le ramène avec des cris de joie Tant son amour jaloux lui plaint la liberté ! ROMÉO Ah ! ne fuis pas encore ! JULIETTE Hélas ! il le faut ! ROMÉO Non ! ne fuis pas encore ! JULIETTE Hélas ! il le faut ! Adieu ! ROMÉO Adieu ! ROMÉO, JULIETTE Adieu ! De cet adieu si douce est la tristesse, Que je voudrais te dire adieu jusqu’à demain ! JULIETTE Adieu mille fois ! (Elle s’échappe des bras de Roméo et entre dans le pavillon). ROMÉO (seul) Va ! repose en paix ! sommeille ! Qu’un sourire d’enfant sur ta bouche vermeille Doucement vienne se poser ! Et murmurant encor ! Je t’aime ! à ton oreille, Que la brise des nuits te porte ce baiser ! (Il s’éloigne.) |
Yet not too far away, but like a captive bird by childish hand confined, held by a silken thread restraining, that scarce begins to fly, and would wing away, the sky regaining, than the child draws him down joyfully so loving jealous he, the captive may’nt go free! ROMEO Stay but a little longer! JULIET Alas! I must go! ROMEO Stay but a little longer! JULIET Alas! I must go! Farewell! ROMEO Farewell! JULIET, ROMEO Of this farewell, so tender is the morrow, that I were fain to say farewell until the dawn! JULIET A thousand times goodnight! (She slips out of Romeo’s arms and returns into her apartments.) ROMEO (alone) Go, rest peacefully! Slumber! May a child’s smile come gently to rest on your ruby lips! And still whispering “I love you!” into your ear, may the night breeze bear you this kiss! (He goes off.) |
Premier Tableau La cellule de Frère Laurent N°10 Entr’acte et scène ROMÉO Mon père ! Dieu vous garde ! FRÈRE LAURENT Eh ! quoi ! le jour à peine Se lève, et le sommeil te fuit ? Quel transport vers moi te conduit ? Quel amoureux souci t’amène ? ROMÉO Vous l’avez deviné, mon père ! c’est l’amour ! FRÈRE LAURENT L’amour ! encor l’indigne Rosaline ? ROMÉO Quel nom prononcez-vous ? Je ne le connais pas. L’œil des élus s’ouvrant à la clarté divine Se souvient-il encor des ombres d’ici-bas ? Aime-t-on Rosaline ayant vu Juliette ? FRÈRE LAURENT Quoi ? Juliette Capulet ? (Juliette paraît, suivie de Gertrude) ROMÉO La voici ! JULIETTE (s’élançant dans les bras de Roméo) Roméo ! ROMÉO Mon âme t’appelait ! Je te vois ! ma bouche est muette ! JULIETTE (à Frère Laurent) Mon père, voici mon époux ! Vous connaissez ce cœur que je lui donne ! |
Scene One Friar Laurence’s cell No.10 Entr’acte and Scene ROMEO Father! God keep you! God keep you! FRIAR LAURENCE Eh, what’s this! Day has scarce dawned, and sleep eludes you? What distemperature leads you to me? What lover’s care brings you? ROMEO You have guessed right, Father, it is love! FRIAR LAURENCE Love! Still the unworthy Rosaline? ROMEO What name is this you utter? I know it not! Does the eye of the elect opening upon the divine light still remember the shadows of this earth? Does one love Rosaline, having seen Juliet? FRIAR LAURENCE What, Juliet Capulet? (Juliet appears, followed by Gertrude.) ROMEO Here she is! JULIET (rushing into Romeo’s arms) Romeo! ROMEO My soul was calling you! I see you! My mouth is dumb! JULIET (to Friar Laurence) Father, this is my bridegroom! You know the heart I give to him! |
À son amour je m’abandonne, Devant le ciel unissez-nous ! FRÈRE LAURENT Oui ! dussé-je affronter une aveugle colère, Je vous prêterai mon secours. Puisse de vos maisons la haine séculaire S’éteindre en vos jeunes amours ! ROMÉO (à Gertrude) Toi, veille au dehors ! (Gertrude sort.) FRÈRE LAURENT Témoin de vos promesses, Gardien de vos tendresses, Que le Seigneur soit avec vous ! À genoux ! (gravement) À genoux ! |
To his love I surrender myself, unite us before Heaven! FRIAR LAURENCE Ay, though I should face a blind rage I will lend you my help. May the ancient hatred between your houses be extinguished in your young love! ROMEO (to Gertrude) Do you keep watch without! (Gertrude goes out.) FRIAR LAURENCE The witness of your promises, the guardian of your love, may the Lord be with you! Kneel down! (gravely) Kneel down! |
N°11 Trio et quatuor FRÈRE LAURENT Dieu qui fit l’homme à ton image ! Et de sa chair et de son sang Créas la femme, et l’unissant À l’homme par le mariage, Consacras du haut de Sion Leur inséparable union ! Regarde d’un œil favorable Ta créature misérable Qui se prosterne devant toi ! JULIETTE, ROMÉO Seigneur, nous promettons d’obéir à ta loi. FRÈRE LAURENT Entends ma prière fervente : Fais que le joug de ta servante Soit un joug d’amour et de paix ! Que la vertu soit sa richesse, Que pour soutenir sa faiblesse Elle arme son cœur du devoir ! JULIETTE, ROMÉO Seigneur, sois mon appui, sois mon espoir ! |
No.11 Trio and Quartet FRIAR LAURENCE O God who madest man in Thine own image and of his flesh and blood created woman, and, joining her to man in wedlock, from Zion’s summit consecrated their inseparable union! Look with a favourable eye upon Thy miserable creature who prostrates himself before Thee! JULIET, ROMEO Lord, we promise to obey Thy law. FRIAR LAURENCE Hear Thou my fervent prayer: Ordain that the yoke of Thy handmaiden may be a yoke of love and peace! Let virtue be her wealth, to strengthen her weakness may she arm her heart with duty! JULIET, ROMEO Lord, be Thou my support, be Thou my hope! |
FRÈRE LAURENT Que leur vieillesse heureuse voie Leurs enfants marchant dans ta voie Et les enfants de leurs enfants ! JULIETTE, ROMÉO Seigneur ! du noir péché c’est toi qui nous défends ! FRÈRE LAURENT Que ce couple chaste et fidèle, Uni dans la vie éternelle, Parvienne au royaume des cieux ! JULIETTE, ROMÉO Seigneur ! sur notre amour daigne abaisser les yeux ! FRÈRE LAURENT (à Roméo) Roméo ! tu choisis Juliette pour femme ? ROMÉO Oui, mon père ! FRÈRE LAURENT (à Juliette) Tu prends Roméo pour époux ? JULIETTE Oui mon père ! (Ils échangent leurs anneaux.) FRÈRE LAURENT (mettant la main de Juliette dans celle de Roméo) Devant Dieu qui lit dans votre âme Je vous unis ! Relevez-vous. (Ils se relèvent, Gertrude entre en scène.) JULIETTE, GERTRUDE, ROMÉO, FRÈRE LAURENT Ô pur bonheur ! ô joie immense ! Le ciel même a reçu nos/leurs serments amoureux ! Dieu de bonté ! Dieu de clémence ! Sois béni par deux cœurs heureux ! etc. (Roméo et Juliette se séparent – Juliette sort avec Gertrude – Roméo sort avec Frère Laurent.) |
FRIAR LAURENCE May their happy old age see their children walking in Thy way and their children’s children! JULIET, ROMEO Lord, from darkest sin it is Thou who dost protect us! FRIAR LAURENCE May this chaste and faithful couple, united in the life eternal, come at last to the Kingdom of Heaven! JULIET, ROMEO Lord, deign to look down upon our love! FRIAR LAURENCE (to Romeo) Romeo, dost thou choose Juliet for thy wife? ROMEO I do, Father. FRIAR LAURENCE (to Juliet) Dost thou take Romeo for thy husband? JULIET I do, Father. (They exchange their rings.) FRIAR LAURENCE (placing Juliet’s hand in Romeo’s) Before God who reads into your hearts I unite you! Now rise to your feet. (They stand. Gertrude enters.) JULIET, GERTRUDE, ROMEO, FRIAR LAURENCE O happiness unalloyed! O immense joy! Heaven itself has received our/their loving vows! God of goodness! God of mercy! Be Thou blessed by two happy hearts! etc. (Romeo and Juliet separate. – Juliet goes off with Gertrude, Romeo with Friar Laurence.) |
Deuxième Tableau Une rue – À gauche la maison des Capulets N°12 Chanson STÉPHANO (seul) Depuis hier je cherche en vain mon maître ! (regardant le balcon de la maison de Capulet) Est-il chez vous, mes seigneurs Capulets ? (arrogant) Voyons un peu si vos dignes valets À ma voix ce matin oseront reparaître ! (Il fait mine de pincer de la guitare sur son épée.) Que fais-tu, blanche tourterelle, Dans ce nid de vautours ? Quelque jour, déployant ton aile, Tu suivras les amours ! Aux vautours, il faut la bataille, Pour frapper d’estoc et de taille Leurs becs sont aiguisés ! Laisse-là ces oiseaux de proie, Tourterelle qui fais ta joie Des amoureux baisers ! Gardez bien la belle ! Qui vivra verra ! Votre tourterelle Vous échappera ! etc. Un ramier, loin du vert bocage Par l’amour attiré, À l’entour de ce nid sauvage A, je crois, soupiré ! Les vautours sont à la curée, Leurs chansons, que fuit Cythérée, Résonnent à grand bruit ! Cependant en leur douce ivresse Nos amants content leur tendresse Aux astres de la nuit ! Gardez bien la belle ! Qui vivra verra ! etc. |
Scene Two A street. – On the left, the Capulets’ house. No.12 Song STEPHANO (alone) Since yesterday have I sought my master in vain! (studying the balcony of Capulet’s house) Is he still with you, my lords Capulet? (arrogantly) Let’s just see if your worthy servants will dare to show themselves this morning at the sound of my voice! (He pretends to strum on his sword like a guitar.) What are you doing, white turtledove, in this nest of vultures? Some day, spreading your wings, you will follow love! With vultures, there must always be fighting, in order to cut and thrust their beaks are whetted! Have done with these birds of prey, turtledove who tak’st thy joy from loving kisses! Guard her well, the fair lady! Who lives will see! – your turtledove will escape from you! etc. A ring-dove, drawn far away from the greenwood by love, I think has sighed round about this savage nest! The vultures are at the quarry, their songs, that Cytherea* flees from, re-echo loudly! Meanwhile in their sweet infatuation our lovers tell their love to the night-stars! Guard her well, the fair lady! Who lives will see! etc. |
N°13 Finale STÉPHANO Ah ! Ah ! voici nos gens ! GRÉGORIO Qui diable à notre porte S’en vient roucouler de la sorte ? STÉPHANO (à part en riant) La chanson leur déplaît ! GRÉGORIO (aux autres valets) Eh ! Parbleu ! n’est-ce pas Celui que nous chassions hier la dague au poing ? LES VALETS C’est lui-même ! l’audace est forte ! STÉPHANO Gardez bien la belle... etc. GRÉGORIO Est-ce pour narguer, mon jeune camarade, Que vous nous régalez de cette sérénade ? STÉPHANO J’aime la musique ! GRÉGORIO C’est clair, c’est clair On t’aura sur le dos en pareille équipée, Cassé ta guitare, mon cher ! STÉPHANO Pour guitare j’ai mon épée, Et j’en sais jouer plus d’un air, GRÉGORIO Ah ! pardieu ! pour cette musique On peut te donner la réplique ! STÉPHANO (dégainant) Viens donc en prendre une leçon ! |
No.13 Finale STEPHANO Haha! Here are our men! GREGORIO Who the devil comes away from our gate cooing like this? STEPHANO (aside, laughing) The song displeases them! GREGORIO (to the other servants) Ah, why, of course! Isn’t this the fellow we chased away yesterday, dagger in hand? THE SERVANTS The very one! He’s an impudent rogue! STEPHANO Guard her well, the fair lady...etc. GREGORIO Is it to flout us, my young friend, that you regale us with this serenade? STEPHANO I dote on music! GREGORIO It’s clear that in some similar jape you’ve had your guitar smashed across your back, my lad! STEPHANO For guitar I have my sword and I know how to play more than one tune upon it. GREGORIO Ah, by God, for this kind of music we can give you the reply! STEPHANO (drawing his sword) Then come and take a lesson from it! |
GRÉGORIO (dégainant) En garde ! LES VALETS (riant) Écoutons, écoutons leur chanson. Quelle rage ! Vertudieu ! Bon courage, Et franc jeu ! Voyez comme Cet enfant Contre un homme Se défend ! Fine lame, Sur mon âme ! Il se bat En soldat ! (Mercutio et Benvolio entrent en scène.) MERCUTIO (indigné) Attaquer un enfant ! Morbleu ! c’est une honte Digne des Capulets ! (Il tire l’épée et se jette entre les combattants.) Tels maîtres, tels valets ! (Tybalt, suivi de Pâris et de quelques amis, entre en scène et relève l’injure.) TYBALT (insolent) Vous avez la parole prompte, Monsieur ! MERCUTIO Moins prompte que le bras ! TYBALT C’est ce qu’il faudrait voir ! |
GREGORIO (drawing his) On guard! THE SERVANTS (laughing) Let’s listen to their nonsense! What fury! Bless my soul! Take heart! And play fair! See how this boy defends himself against a man! A skilled swordsman, ’pon my soul! He fights like a soldier! (Mercutio and Benvolio enter.) MERCUTIO (as he enters, indignantly) To set upon a boy! ’Zounds! ’Tis a shameful deed worthy of the Capulets! (He draws his sword and hurls himself between the combatants.) Like masters. like servants! (Tybalt, followed by Paris and a few friends, enters and takes up the insult.) TYBALT (insolently) You have a ready tongue, sir! MERCUTIO Not so ready as my arm! TYBALT We must see about that! |
MERCUTIO C’est ce que tu verras ! (Mercutio et Tybalt croisent le fer ; au même instant, Roméo accourt et se précipite entre eux.) ROMÉO Arrêtez ! MERCUTIO Roméo ! TYBALT (vindicatif) Roméo ! son démon me l’amène ! (à Mercutio, avec une politesse ironique) Permettez, permettez que sur vous je lui donne le pas ! (à Roméo, avec hauteur) Allons ! vil Montaigu ! flamberge au vent ! Dégaine ! Toi qui nous insultas jusqu’en notre maison, C’est toi qui va porter la peine De cette indigne trahison ! Toi dont la bouche maudite À Juliette interdite Osa, je crois, parler tout bas, |
MERCUTIO And that you shall! (Mercutio and Tybalt cross; at the same moment, Romeo hurries up and dashes between them.) ROMEO Stop! MERCUTIO Romeo! TYBALT (vengefully) Romeo! His demon leads him to me! (to Mercutio, with ironic politeness) Permit me to give him precedence over you! (to Romeo, haughtily) Come on, vile Montague! Out with your sword! Unsheathe! You who insulted us in our very house, ’tis you who will pay the penalty for this unworthy treachery! You whose accursed lips forbidden to Juliet did dare, I think, to whisper low, – |
(avec mépris) Écoute le seul mot que m’inspire ma haine ! Tu n’es qu’un lâche ! (Roméo porte vivement la main à son épée. Après un moment d’hésitation il la renfonce dans le fourreau.) ROMÉO (contenu et digne) Allons... tu ne me connais pas, Tybalt, et ton insulte est vaine ! J’ai dans le cœur des raisons de t’aimer Qui, malgré moi, me viennent désarmer ! Je ne suis pas un lâche ! Adieu ! (Il fait un pas pour s’éloigner.) TYBALT Tu crois peut-être Obtenir le pardon de tes offenses, traître ? ROMÉO Je ne t’ai jamais offensé, Tybalt ; Des haines le temps est passé ! MERCUTIO Tu souffrirais ce nom de lâche, Ô Roméo ! T’ai-je entendu ? Eh bien, donc ! Si ton bras doit faillir à sa tâche C’est à moi désormais que l’honneur en est dû ! ROMÉO Mercutio ! – je t’en conjure ! MERCUTIO Non ! Je vengerai ton injure ! Misérable Tybalt ! en garde, et défends-toi ! TYBALT Je suis à toi ! ROMÉO Écoute ! MERCUTIO Non ! Laisse-moi ! CHŒUR (Montaigus) Bien sur ma foi ! (Capulets) En lui j’ai foi ! |
(scornfully) hear the one word my hatred suggests to me! Thou’rt naught but a coward! (Romeo’s hand goes quickly to his sword. After a moment’s hesitation he taps it down into its scabbard.) ROMEO (restrained and dignified) Come now!...you do not know me, Tybalt, and your insult is useless! I have in my heart reasons to love you which despite myself come to disarm me! I am no coward! Farewell! (He moves as though to go.) TYBALT You think perhaps to obtain pardon for your injuries, traitor? ROMEO I have never injured you, Tybalt; the time for hatred is past! MERCUTIO Will you suffer this name of coward, 0 Romeo? Did I hear you aright? Very well then, if your arm is to fail in its task henceforward the honour belongs to me! ROMEO Mercutio! – I entreat you! MERCUTIO No! I shall avenge your insult! Tybalt, you rat-catcher, on guard and defend yourself! TYBALT I am for you! ROMEO Listen to me! MERCUTIO No, let me be! CHORUS (Montagues) Excellent, in faith! (Capulets) I trust in him! |
STÉPHANO, BENVOLIO, MERCUTIO Capulets ! Capulets ! race immonde ! Frémissez de terreur ? Et que l’enfer seconde Sa haine et sa fureur ! ROMÉO Haine, haine, en malheurs féconde ! Dois-tu toujours par ta fureur Donner au monde Un spectacle d’horreur ? TYBALT, PÂRIS, GRÉGORIO Montaigus, Montaigus ! race immonde ! Frémissez de terreur ! Et que l’enfer seconde Ma/sa haine et ma/sa fureur ! CHŒUR Capulets ! Capulets ! race immonde ! Montaigus ! Montaigus ! race immonde ! Frémissez de terreur ! Et que l’enfer seconde ! Sa haine et sa fureur i (Tybalt et Mercutio croisent le fer.) MERCUTIO Ah ! blessé !... ROMÉO Blessé !... MERCUTIO Que le diable Soit de vos deux maisons ! Pourquoi te jeter entre nous ? ROMÉO Ô sort impitoyable ! (à ses amis) Secourez-le ! MERCUTIO (chancelant) Soutenez-moi ! (On emporte Mercutio qui succombe. Roméo, après l’avoir suivi des yeux pendant quelques instants, redescend la scène et, s’abandonnant tout entier à sa rage, s’écrie.) |
STEPHANO, BENVOLIO Capulets! Capulets! Foul brood! Shake with terror! And may hell assist his hatred and his fury! ROMEO Hatred, hatred fruitful in miseries! Must you always through your fury give to the world a spectacle of horror? TYBALT, PARIS, GREGORIO Montagues! Montagues! Foul brood! Shake with terror! And may hell assist my/his hatred and my/his fury! CHORUS Capulets! Capulets! Foul brood! Montagues! Montagues! Foul brood! Shake with terror! And may hell assist his hatred and his fury! (Tybalt and Mercutio begin to fight.) MERCUTIO Ah! I am hurt!... ROMEO Hurt!... MERCUTIO A plague o’ both your houses! Why came you between us? ROMEO O pitiless fate! (to his friends) Help him! MERCUTIO (staggering) Hold me up! (Mercutio is carried away, and dies. Romeo, having gazed after him for a few moments, comes back downstage and, giving himself up wholly to his rage, cries:) |
ROMÉO Ah ! maintenant remonte au ciel, prudence infâme ! Et toi, fureur à l’œil de flamme, Sois de mon cœur l’unique loi ! (tirant son épée) Tybalt ! – Il n’est ici d’autre lâche que toi ! (Ils croisent le fer.) ROMÉO (à Tybalt, en lui portant un coup) À toi ! (Tybalt est touché et chancelle : Capulet entre en scène, court à lui et le soutient dans ses bras. On cesse de se battre). CAPULET Grand Dieu ! Tybalt ! BENVOLIO (à Roméo) Sa blessure est mortelle ! Fuis sans perdre un instant ! ROMÉO (à part) Ah ! qu’ai-je fait ? Moi ! fuir ! maudit par elle ! BENVOLIO C’est la mort qui t’attend ! ROMÉO (avec désespoir) Qu’elle vienne donc ! Je l’appelle ! TYBALT (à Capulet d’une voix expirante) Un dernier mot ! et sur mon âme... exaucez-moi ! CAPULET (solennellement) Tu seras obéi, je t’en donne ma foi ! (Une foule de bourgeois a envahi la scène.) CHŒUR Qu’est-ce donc ? Qu’est-ce donc ? c’est Tybalt ! Il meurt ! CAPULET (à Tybalt) Reviens à toi ! STÉPHANO, BENVOLIO, ROMÉO, PÂRIS, GRÉGORIO, CHŒUR Ô jour de deuil ! ô jour de larmes ! Un aveugle courroux |
ROMEO Ah! Now away back to heaven, infamous caution! And thou, fire-ey’d fury, be my conduct now! (drawing his sword) Tybalt! – there’s no other coward here but you! (They cross swords.) ROMEO (to Tybalt, as he thrusts at him) For you! (Tybalt is hit and staggers; Capulet enters, runs up to him and supports him in his arms. The fighting stops.) CAPULET Great God! Tybalt! BENVOLIO (to Romeo) His wound is mortal! Escape without losing a moment! ROMEO (aside) Ah, what have I done? I – to flee – cursed by her! BENVOLIO ’Tis death that awaits you! ROMEO (in despair) Let it come, then, I summon it! TYBALT (to Capulet, in a dying voice) One last word!...and upon your soul...fulfil my wishes! CAPULET (solemnly) You shall be obeyed. I give you my solemn word! (A crowd of townspeople have invaded the stage.) CHORUS What’s this then? What’s this then? – It’s Tybalt! He is dying! CAPULET (to Tybalt) Come to yourself! STEPHANO, BENVOLIO, ROMEO, PARIS, GREGORIO, CHORUS O day of mourning! O day of tears! An unreasoning anger |
Ensanglante nos armes ! Et le malheur plane sur nous ! Ô jour de deuil, etc. (On entend des fanfares.) CHŒUR Le Duc ! Le Duc ! (Le Duc entre en scène suivi de son cortège de gentilshommes et de pages portant des torches. Capulet se tourne vers le Duc). CAPULET Justice ! TOUS LES CAPULETS Justice ! CAPULET (montrant le corps de Tybalt) C’est Tybalt ! mon neveu, tué par Roméo ! ROMÉO Il avait le premier frappé Mercutio ! J’ai vengé mon ami, que mon sort s’accomplisse ! STÉPHANO, ROMÉO, BENVOLIO, PÂRIS, GRÉGORIO, CAPULET, LES MONTAIGUS,LES CAPULETS Justice ! Justice ! LE DUC Eh quoi ? toujours du sang ? De vos cœurs inhumains Rien ne pourra calmer les fureurs criminelles ! Rien ne fera tomber les armes de vos mains, Et je serai moi-même atteint par vos querelles ! (à Roméo) Selon nos lois, ton crime a mérité la mort, Mais tu n’es pas l’agresseur... je t’exile ! ROMÉO Ciel ! LE DUC (aux Montaigus et aux Capulets) Et vous dont la haine en prétextes fertile Entretient la discorde et l’effroi dans la ville, |
stains our weapons with blood! And misfortune hovers above us! O day of mourning, etc. (Trumpets are heard.) CHORUS The Duke! The Duke! (The Duke enters followed by his retinue of gentlemen and pages carrying torches. Capulet turns towards the Duke.) CAPULET Justice! ALL THE CAPULETS Justice! CAPULET (pointing to Tybalt’s body) It’s Tybalt. my nephew, slain by Romeo! ROMEO He had struck down Mercutio first! I avenged my friend, let my fate take its course! STEPHANO, ROMEO, BENVOLIO, PARIS, GREGORIO, CAPULET, THE MONTAGUES, THE CAPULETS Justice! Justice! THE DUKE What’s this? Always blood! Nothing will still the criminal furies in your hearts! Nothing will make the weapons drop from your hands and I myself shall be touched by your quarrels! (to Romeo) According to our laws your crime has merited death. But you are not the aggressor...I exile you! ROMEO O heaven! THE DUKE (to the Montagues and Capulets) And you whose hatred, fertile in pretexts, maintains discord and fear in the city, |
Prêtez tous devant moi le serment solennel D’obéissance aux lois et du prince et du ciel ! ROMÉO Ah ! jour de deuil et d’horreur et d’alarmes, Mon cœur se brise éperdu de douleur ! Injuste arrêt qui trop tard nous désarmes, Tu mets le comble à ce jour de malheur ! Je vois périr dans le sang et les larmes Tous les espoirs et tous les vœux de mon cœur ! LE DUC Ah ! jour de deuil et d’horreur et d’alarmes, Je vois couler et mon sang et le leur ! Trop juste arrêt où s’émoussent leurs armes, Tu viens trop tard en ce jour de malheur ! En la noyant dans le sang et les larmes C’est la cité que l’on frappe en mon cœur ! ROMÉO Jour d’horreur et d’alarmes, Mon cœur se brise éperdu de douleur ! etc. CAPULET Jour de deuil et d’horreur et d’alarmes, Mon cœur se brise éperdu de douleur ! Injuste arrêt qui trop tard nous désarmes, Tu mets le comble à ce jour de malheur ! Je vois périr dans le sang et les larmes Tous les espoirs, tous les vœux de mon cœur ! STÉPHANO, LES MONTAIGUS Ah ! jour de deuil et d’horreur et d’alarmes. Mon cœur se brise éperdu de douleur ! Injuste arrêt où s’émoussent leurs armes, Tu viens trop tard en ce jour de malheur ! Je vois périr dans le sang et les larmes Avec les lois, la patrie et l’honneur ! BENVOLIO, PÂRIS, LES CAPULETS Ah ! jour de deuil et d’horreur et d’alarmes, Mon cœur se brise éperdu de douleur ! Injuste arrêt qui trop tard nous désarmes, Tu mets le comble à ce jour de malheur ! Non ! Non ! nos cœurs dans le sang et les larmes, N’oublieront pas le devoir et l’honneur ! |
take before me, all of you, the solemn oath of obedience to the laws of your prince and of heaven! ROMEO Ah, day of mourning and horror and alarms, my heart is breaking, distraught with grief! Unjust decree which disarms us too late, you set the crown on this day of woe! I see perish in blood and tears all the hopes and desires of my heart! THE DUKE Ah, day of mourning and horror and alarms, I see both my blood and theirs flowing! Too just decree by which their weapons are blunted, you come too late on this day of woe! By drowning it in blood and tears ’tis the city you strike in my heart! ROMEO Day of horror and alarms, my heart is breaking, distraught with grief! etc. CAPULET Day of mourning and horror and alarms, my heart is breaking, distraught with grief! Unjust decree which disarms us too late, you set the crown on this day of woe! I see perish in blood and tears all the hopes, all the desires of my heart! STEPHANO, THE MONTAGUE RETAINERS Ah, day of mourning and horror and alarms, my heart is breaking, distraught with grief! Unjust decree by which their weapons are blunted. you come too late on this day of woe! I see perish in blood and tears, together with the laws, our homeland and our honour! BENVOLIO, PARIS, THE CAPULET RETAINERS Ah, day of mourning and horror and alarms, my heart is breaking, distraught with grief! Unjust decree that disarms us too soon, you set the crown on this day of woe! No, no! Our hearts ’mid the blood and the tears will not forget their duty and their honour! |
LE DUC Tu quitteras la ville dès ce soir. ROMÉO Ô désespoir ! l’exil ! l’exil ! Non ! je mourrai, mais je veux la revoir ! CAPULET, LE CHŒUR La paix ? Non ! non ! non ! non ! jamais ! |
THE DUKE You will leave the city this evening. ROMEO O despair! Exile! Exile! No! I shall die but I will see her again! CAPULET, CHORUS Peace? No! no! no! no! no, never! |
Premier Tableau La chambre de Juliette (Il fait encore nuit. La scène est éclairée par un flambeau.) N°14 Duo (Juliette est assise : Roméo est à ses pieds.) JULIETTE Va ! Je t’ai pardonné, Tybalt voulait ta mort ; S’il n’avait succombé, tu succombais toi-même ! Loin de moi la douleur ! loin de moi le remords ! Il te haïssait ... et je t’aime ! ROMÉO Ah ! redis-le, redis-le, ce mot si doux ! JULIETTE Je t’aime, ô Roméo ! Je t’aime, ô mon époux ! JULIETTE, ROMÉO Nuit d’hyménée ! Ô douce nuit d’amour ! La destinée M’enchaîne à toi sans retour, Ô volupté de vivre, Ô charmes tout puissants ! Ton doux regard m’enivre, Ta voix ravit mes sens ! Sous tes baisers de flamme Le ciel rayonne en moi, Je t’ai donné mon âme ; À toi, toujours à toi. Ô volupté de vivre, Ô charmes tout puissants, etc. Nuit d’hyménée ! etc. (Les premières lueurs du jour éclairent les vitraux de la fenêtre – On entend chanter l’alouette.) |
Scene One Juliet’s room (It is still night. The stage is lit by a torch.) No.14 Duet (Juliet is seated; Romeo is at her feet.) JULIET Come, I have forgiven you. Tybalt desired your death; if he had not died, you would have done so yourself! Away with sorrow! Away with remorse! He hated you...and I love you! ROMEO Ah, say it again, that word so sweet! JULIET I love you, o Romeo! I love you, o my husband! JULIET, ROMEO O bridal night! O sweet night of love! Destiny binds me to you for ever. O sheer delight in living, O all-powerful charms! Your gentle gaze fills me with rapture, your voice ravishes my senses! Beneath your ardent kisses Heaven is radiant within me. 1 have given you my heart; it is yours, yours for ever. O sheer delight in living, o all-powerful charms, etc. O bridal night! etc. (The first glimmers of day lighten the windowpanes. – A lark is heard singing.) |
JULIETTE Roméo ! qu’as-tu donc ? ROMÉO (se levant) Écoute, ô Juliette ! L’alouette déjà nous annonce le jour ! JULIETTE Non ! non, ce n’est pas le jour, Ce n’est pas l’alouette Dont le chant a frappé ton oreille inquiète, C’est le doux rossignol, confident de l’amour ! ROMÉO C’est l’alouette, hélas ! messagère du jour ! Vois ces rayons jaloux dont l’horizon se dore ; De la nuit les flambeaux pâlissent, et l’aurore, Dans les vapeurs de l’Orient, Se lève en souriant ! JULIETTE Non ! non, ce n’est pas le jour ! Cette lueur funeste N’est que le doux reflet du bel astre des nuits ! Reste ! Reste ! ROMÉO Ah ! vienne donc la mort ! je reste ! JULIETTE Ah ! tu dis vrai : c’est le jour ! Fuis, Il faut quitter ta Juliette ! ROMÉO Non ! Non, ce n’est pas le jour ! Ce n’est pas l’alouette ! C’est le doux rossignol, confident de l’amour ! JULIETTE C’est l’alouette, hélas ! messagère du jour ! Pars ! ma vie ! ROMÉO Un baiser et je pars ! |
JULIET What is it, Romeo? ROMEO (rising) O Juliet, listen! Already the lark is telling us it’s day! JULIET No, no! It is not morn, ’tis not the lark whose song hath pierc’d the fearful hollow of thine ear, it is the nightingale, love’s confidant! ROMEO It is the lark, alas, herald of morn! See those envious streaks gliding the horizon; night’s candles are burnt out and the dawn breaks smiling in the mists of the east! JULIET No, no, it is not morn, that fatal gleam is but the soft reflex of the moon! Stay! O stay! ROMEO Ah, come then, death! I will stay! JULIET Ah, you are right: it is morn! Flee! You must leave your Juliet! ROMEO No, no, it is not day! ’Tis not the lark! It is the gentle nightingale, love’s confidant! JULIET Alas, it is the lark, herald of morn! Go now, my life! ROMEO One kiss and I’ll be gone! |
JULIETTE Loi cruelle ! Loi cruelle ! ROMÉO Ah ! Reste encor en mes bras enlacés ! Reste encor ! reste encor ! Un jour il sera doux à notre amour fidèle De se ressouvenir de ses tourments passés. JULIETTE Il faut partir, hélas ! Il faut quitter ces bras Où je te presse Et t’arracher à cette ardente ivresse. JULIETTE Il faut partir, hélas! Il faut quitter ces bras Où je te presse Et t’arracher À cette ardente ivresse ! Ah ! que le sort Qui de toi me sépare Plus que la mort Est cruel et barbare ! etc. ROMÉO Il faut partir, hélas ! Alors que dans ses bras Elle me presse Et l’arracher À cette ardente ivresse ! Ah ! que le sort Qui de toi me sépare Plus que la mort Est cruel et barbare ! etc. ROMÉO Adieu, ma Juliette, adieu ! JULIETTE Adieu ! ROMÉO, JULIETTE Toujours à toi ! JULIETTE Adieu, mon âme ! adieu, ma vie ! Anges du ciel, à vous, à vous, je le confie ! |
JULIET O cruel decree! cruel decree! ROMEO Ah, stay, stay awhile in my entwining arms! Stay awhile! One day it will be sweet for our true love to recall its past torments. JULIET Alas, you must go! You must leave these arms in which I clasp you and tear yourself from this passionate joy. JULIET Alas, we must part! You must leave these arms in which you clasp me, and tear yourself from this passionate joy! Ah, how much more cruel and barbarous than death is the fate which severs me from you! etc. ROMEO Alas, we must part! I must leave these arms in which I clasp you, and tear myself from this passionate joy! Ah, how much more cruel and barbarous than death is the fate which severs me from you! etc. ROMEO Farewell, my Juliet, farewell! JULIET Farewell! ROMEO, JULIET Ever thine! JULIET Farewell, my soul, farewell, my life! Angels in heaven, to you, to you do I confide him! |
N°15 Quatuor GERTRUDE (entrant très agitée) Juliette ! (se rassurant) Ah ! le ciel soit loué ! Votre époux Est parti ! Voici votre père ! JULIETTE Dieu, saurait-il ? GERTRUDE Rien, rien, j’espère ! Frère Laurent le suit ! JULIETTE Seigneur ! protège-nous ! (Entre Capulet suivi de Frère Laurent.) CAPULET Quoi, ma fille ! la nuit à peine est achevée, Et tes yeux sont ouverts, Et te voilà levée ! Hélas ! notre souci, je le vois, est pareil, Et les mêmes regrets hâtent notre réveil ! Que l’hymne nuptial succède aux cris d’alarmes ! Fidèle au dernier vœu que Tybalt a formé, Reçois de lui l’époux que sa bouche a nommé ; Souris au milieu de tes larmes ! JULIETTE Cet époux... quel est-il ? CAPULET Le plus vaillant de tous, Le comte Pâris ! JULIETTE (à part) Dieu ! FRÈRE LAURENT (bas, à Juliette) Silence ! GERTRUDE, FRÈRE LAURENT Calmez-vous ! Calmez-vous ! |
No.15 Quartet GERTRUDE (entering in great agitation) Juliet! (recovering herself) Ah, heaven be praised, your husband has gone! Here is your father! JULIET God! Can he know? GERTRUDE Not a thing, not a thing, I hope! Friar Laurence is with him! JULIET Lord, protect us! (Enter Capulet accompanied by Friar Laurence.) CAPULET What, my daughter! Night is scarce done and your eyes are open, and here you are already risen! Alas, our anxiety, I see, is of a kind and the same regret speeds our awakening! Let the wedding hymn succeed the cries of alarm! Faithful to Tybalt’s last wish, receive from him the husband he named for you; smile in the midst of your tears! JULIET This husband...who is he? CAPULET The most valiant of all, Count Paris! JULIET (aside) Oh, God! FRIAR LAURENCE (under his breath, to Juliet) Silence! GERTRUDE Compose yourself! Compose yourself! |
CAPULET L’autel est préparé, Pâris a ma parole, Soyez unis tous deux Sans attendre à demain ! Que l’ombre de Tybalt, Présente à cet hymen, S’apaise, s’apaise enfin et te console ! La volonté des morts Comme celle de Dieu lui-même, Est une loi sainte, une loi suprême ! Nous devons respecter la volonté des morts ! JULIETTE Ne crains rien, Roméo, mon cœur est sans remords ! GERTRUDE Dans leur tombe, Laissons en paix dormir les morts ! FRÈRE LAURENT Elle tremble Et mon cœur partage ses remords. CAPULET Frère Laurent saura te dicter ton devoir, Nos amis vont venir ; je vais les recevoir. (Il sort, suivi de Gertrude.) |
CAPULET The altar is prepared, the groom hath approbation, be ye united now nor invite more delay! May Tybalt’s wand’ring shade, approving us today, be laid then, be laid in final consolation! The will of the dead like that of God himself is a sacred law, a supreme law! We must respect the will of the dead! JULIET Fear thee not, Romeo, my heart is faithful still! GERTRUDE Let them slumber, may the dead rest in peace! FRIAR LAURENCE She is trembling and my heart sad forebodings now fill. CAPULET Friar Laurence will be able to dictate your duty to you. Our friends will be coming; I go to receive them. (He goes out, followed by Gertrude.) |
N°16 Scène JULIETTE (à Frère Laurent) Mon père ! Tout m’accable ! Tout est perdu ! J’ai, pour vous obéir, Caché mon désespoir et mon amour coupable. C’est à vous de me secourir, À vous de m’arracher à mon sort misérable ! Parlez, mon père, Parlez ou bien je suis prête à mourir ! FRÈRE LAURENT Ainsi, la mort ne trouble point votre âme ? JULIETTE Non ! Plutôt la mort que ce mensonge infâme ! |
No.16 Scene JULIET (to Friar Laurence) Father! Everything overwhelms me! All is lost! In obedience to you, I have concealed my despair and my guilty love. It is for you to help me, for you to rescue me from my miserable fate! Speak, Father, else I am ready to die! FRIAR LAURENCE So then, death does not trouble your conscience? JULIET No! No! Rather death than this vile deception! |
FRÈRE LAURENT Buvez donc ce breuvage, Et des membres au cœur Va soudain se répandre une froide langueur, De la mort mensongère image. Dans vos veines soudain le sang s’arrêtera, Bientôt une pâleur livide effacera Les roses de votre visage ; Vos yeux seront fermés ainsi que dans la mort ; En vain éclateront alors les cris d’alarmes ! « Elle n’est plus ! diront vos compagnes en larmes ; Et les anges du ciel répondront : « Elle dort !». C’est là qu’après un jour votre corps et votre âme Comme d’un foyer mort se ranime la flamme, Sortiront enfin de ce lourd sommeil. Par l’ombre protégés, votre époux et moi-même, Nous épierons votre réveil, Et vous fuirez au bras De celui qui vous aime. Hésitez-vous ? JULIETTE (prenant le flacon) Non ! non ! à votre main J’abandonne ma vie. FRÈRE LAURENT À demain ! JULIETTE À demain ! |
FRIAR LAURENCE Then drink this potion: and from your limbs to your heart will suddenly spread a cold and drowsy humour in a false likeness of death. Suddenly the blood will stop coursing in your veins, presently a ghastly pallor will efface the roses in your lips and cheeks; your eyes will close as though in death! In vain, then, will the cries of alarm break out: “She is no more,” your weeping companions will say. And the angels in heaven will make reply: “She is asleep.” Then will it be that after one day your body and soul, like a spent fire bursting into flame again, will come out of this heavy sleep. Protected by the darkness your husband and myself will watch over your awakening, and you will fly into the arms of the one who loves you. Do you hesitate? JULIET (taking the phial) No! No! Into your hands I commend my life. FRIAR LAURENCE Till tomorrow! JULIET Till tomorrow! |
N°17 Scène et air JULIETTE Dieu ! quel frisson court dans mes veines ! Si ce breuvage était sans pouvoir ? Craintes vaines ! Je n’appartiendrai pas au comte malgré moi ! Non ! non ! ce poignard sera le gardien de ma foi ! Viens, viens ! Amour, ranime mon courage, Et de mon cœur chasse l’effroi ! Hésiter, c’est te faire outrage, Trembler est un manque de foi ! Verse, verse toi-même ce breuvage ! Ah ! verse ce breuvage, |
No.17 Scene and Air JULIET Heav’n! What a chill doth overrun me! What if this potion work not at all? Idle terrors! They cannot make me wed the count ’gainst my will! No! no! For this poignard shall be the guard of my vow! Come! Come! O love, revive my fond devotion, and from my heart banish dismay! Now to doubt, that were to disown thee, to fear were my love to betray, never! Never! Rather for dead may he bemoan me! Ah! for dead bemoan me! |
Ô Roméo, je bois à toi ! Mais si demain pourtant dans ce caveau funèbre Je m’éveillais avant son retour ? Dieu puissant ! Cette pensée horrible a glacé tout mon sang ! Que deviendrai-je en ces ténèbres, Dans ce séjour de mort et de gémissements Que les siècles passés ont rempli d’ossements ? Où Tybalt, tout saignant encor de sa blessure, Près de moi, dans la nuit obscure, dormira, Dieu, ma main Rencontrera sa main ! (troublée, comme si elle voyait le fantôme de Tybalt) Quelle est cette ombre à la mort échappée ? C’est Tybalt ! Il m’appelle ! Il veut, de mon chemin, Écarter mon époux ! Et sa fatale épée ; Non ! fantômes ! disparaissez ! Dissipe-toi, funeste rêve ! Que l’aube du bonheur se lève Sur l’ombre des tourments passés ! Viens ! Amour, ranime mon courage Et de mon cœur chasse l’effroi ! Hésiter, c’est te faire outrage ! Trembler est un manque de foi ! Verse, verse, verse toi-même ce breuvage, Ah ! verse ce breuvage, Ô Roméo, je bois à toi ! |
O, my belov’d, I will obey! But, if tomorrow morn, ere he return, I waken, amid the lonely chill of the tomb? Heavenly Pow’rs! This horrible conceit chills the blood in my veins! What should I do, lone and forsaken, if in yon abode of death, none near to heed my moans, that the centuries past have replenish’d with bones? And wherein bloody Tybalt, fest’ring yet is lying, close at hand, in the gloom espying, I should view. Heav’ns! And if his hand were touching mine! (in bewilderment, as if seeing Tybalt’s ghost) What is this shade, from the tomb grimly gazing? It is he! It is Tybalt! He calls me to depart from the one whom I love, his fatal blade upraising. No! Ye phantoms! Vanish away! Vanish away, oh vision frightful! Now dawn, oh morn of joy delightful above the gloom of woes gone by! Come! Oh love! Revive my fond devotion, and from my heart banish dismay! Now to doubt, that were to disown thee! To fear, were my love to betray! Never! never! Rather for dead may he bemoan me! Ah! for dead bemoan me! O my belov’d, I will obey! |
Ballet Deuxième tableau N°18 Cortège nuptial Une galerie du palais. Au fond, les portes de la chapelle (Un prélude d’orgue se fait entendre, les portes de la chapelle s’ouvrent : un cortège de clercs et d’enfants de chœur entre en scène). N°18a Épithalame JULIETTE Loi rigoureuse, loi rigoureuse ! Ah ! Je tremble ! malheureuse ! Loi rigoureuse ! Ô mortel effroi ! Sa tendresse m’est ravie ! Ô loi rigoureuse ! mortel effroi ! Lui seul est ma vie, à lui ma foi, Le sort sans pitié l’a séparé de moi ! GERTRUDE Loi rigoureuse, loi rigoureuse ! Ô mortel effroi ! Ô Juliette malheureuse ! Ô loi rigoureuse, mortel effroi L’espérance t’est ravie ! Aux maux de la vie résigne-toi ! Du sort implacable Il faut subir la loi ! |
Ballet Scene Two No.18 Wedding Procession A gallery in the palace. At the back, the doors of the chapel (An organ prelude is heard; the chapel doors open; a procession of choirmen and boys comes into view.) No.18a Epithalamium JULIET Heart-rending power, heart-rending power! Ah! I tremble! Woeful hour! Hear-rending power! Woe, ah, woe is me! They have taken him, my treasure! Oh, heart-rending power! Ah, woe is me! In him was all my pleasure, my life was he, yet fortune unkind holds him apart from me! GERTRUDE Heart-rending power, heart-rending power! Woe, ah, woe is me! Oh fairest Juliet! Woeful hour! Oh, heart-rending power! Ah, woe is me! From thy bosom hope is banish’d, yet tho’ joy be vanish’d, resigned be! What fate hath in store, our hearts can ne’er foresee! |
PÂRIS, CAPULET, MANUELA, PEPITA, ANGELO, CHŒUR Ô Juliette, sois heureuse ! Mon/son âme amoureuse Subit ta loi ! Ô Juliette sois heureuse ! Vois mon/son âme amoureuse Subit ta loi ! Quand Dieu même t’y convie Souris à la vie qui s’ouvre à toi ! Mon/son cœur pour jamais va t’engager sa foi FRÈRE LAURENT Ô Juliette ! ton âme peut croire en moi ! Ô Juliette, sois heureuse ! Ton âme amoureuse peut croire en moi ! Quand Dieu même t’y convie Ah ! souris à la vie qui s’ouvre à toi ! Ton âme peut croire en moi. Le ciel te protège et veillera sur toi ! CHŒUR Ô Juliette, sois heureuse ! Son âme amoureuse subit ta loi ! Son cœur pour jamais va t’engager sa foi ! Chœur et danse CHŒUR Frappez l’air, chants joyeux, Chants de Hyménée ! Plus de fronts soucieux Dans cette journée ! Frappez l’air, etc. Nous lisons dans vos yeux Votre destinée. Frappez l’air, chants joyeux, Montez jusqu’aux cieux ! Frappez l’air, etc. |
PARIS, CAPULET, MANUELA, PEPITA, ANGELO,CHORUS Oh fairest Juliet! Joyful hour! My/his heart owns thy power Of fairest Juliet! Joyful hour! Now my/his heart owns thy power. and glows for thee! Since of Heaven ’tis the pleasure rejoice in the treasure confided thee! My/his heart for aye to thine shall united be! FRIAR LAURENCE O fairest Juliet! Thy heart yet may trust in me! O fairest Juliet! Joyful hour! Tho’ darkness may lower, yet trust in me! Since of Heaven ’tis the pleasure, ah! rejoice in the treasure confided thee! Thy heart yet may trust in me for Heav’n shall protect and shall watch over thee! CHORUS O fairest Juliet! Joyful hour! His heart own thy power! His heart shall for aye to thine united be! Chorus and Dance CHORUS Let joyful songs rend the air, wedding songs! Away with anxious frowns on this fair day! Let joyful songs, etc. We read in your eyes your good fortune. Let joyful songs rend the air, and rise to the heavens! Let joyful songs, etc. |
N°19 Finale CAPULET Ma fille, cède aux vœux Du fiancé qui t’aime ! Le ciel va vous unir par des nœuds éternels ! De cet hymen béni voici l’instant suprême ! Le bonheur vous attend au pied des saints autels ! (Pâris s’avance et se dispose à passer son anneau au doigt de Juliette.) JULIETTE (retirant sa main et à demi-voix comme dans un rêve) La haine est le berceau de cet amour fatal ! Que le cercueil soit mon lit nuptial ! (Elle porte la main à sa tête et en détache sa couronne de fiancée ; ses cheveux se dénouent et tombent sur ses épaules.) CAPULET Juliette ! reviens à toi ! JULIETTE Ah ! soutenez-moi ! je chancelle ! (On l’entoure et on la soutient.) Quelle nuit m’environne ? Et quelle voix m’appelle ? Est-ce la mort ? J’ai peur ! Mon père ! Adieu ! (Elle tombe inanimée dans les bras de ceux qui l’entourent.) CAPULET (égaré) Juliette ! ma fille ! ah ! (atterré) Morte ! GERTRUDE, PÂRIS, CHŒUR Morte ! CAPULET (avec désespoir) Morte ! TOUS Juste Dieu ! |
No.19 Finale CAPULET My daughter, yield to the wishes of the bridegroom who loves you! Heaven is about to unite you by eternal bonds! Of this blest marriage now is the supreme moment! Happiness awaits you at the foot of the holy altars! (Paris steps forward and prepares to slip his wedding- ring on to Juliet’s finger.) JULIET (withdrawing her hand, and in an undertone, as though in a dream) Hatred is the cradle of this fatal love! Let the grave be my wedding-bed! (She lifts her hand to her head and unfastens her bridal chaplet; her hair comes undone and tumbles down about her shoulders.) CAPULET Juliet! Come to yourself! JULIET Ah, support me! I am falling! (People surround her and hold her up.) What is this darkness enclosing me? And what this voice calling me? Is this death? I am afraid! Father! Farewell! (She falls senseless into the arms of those round about her.) CAPULET (bewildered) Juliet! My daughter! Ah! (horror-struck) Dead! GERTRUDE, PARIS, CHORUS Dead! CAPULET (despairingly) Dead! ALL Righteous God! |
Premier Tableau Une crypte souterraine N°20 Entr’acte N°20a Scène FRÈRE LAURENT Eh ! bien ! ma lettre à Roméo ? FRÈRE JEAN Son page, attaqué par les Capulets, Vient d’être ramené blessé Dans le palais de son maître Et n’a pu s’acquitter du message. Voici la lettre ! FRÈRE LAURENT Ô funeste hasard ! Qu’un autre messager parte cette nuit même ! Venez ! chaque instant de retard Nous jette en un péril extrême ! |
Scene One An underground crypt No.20 Entr’acte No.20a Scene FRIAR LAURENCE ’Tis you! Hath Romeo my note? FRIAR JOHN His page, set upon by the Capulets, was wounded there, and borne away, into the house of his master, failing so to deliver your message. Here is the letter! FRIAR LAURENCE Oh! untoward return! Let one this very night bear him the fatal letter! Away! ’tis a perilous plight! The sooner he is gone, the better! |
Deuxième Tableau Le Tombeau N°21 Le Sommeil de Juliette N°22 Scène et duo (Au bout d’un moment, on entend le bruit d’un levier ébranlant la porte. Elle cède avec bruit. Roméo paraît.) ROMÉO C’est là ... (avec un sentiment de terreur) Salut ! tombeau sombre et silencieux ! Un tombeau ! non ! non ! ô demeure plus belle Que le séjour même des cieux ! Salut ! palais splendide et radieux ! (apercevant Juliette, et s’élançant vers le tombeau) Ah ! la voilà ! c’est elle ! Viens, funèbre clarté ! Viens l’offrir à mes yeux. (prenant la lampe funéraire) |
Scene Two The Tomb No.21 Juliet’s Sleep No.22 Scene and Duet (After a while, the sound of a crowbar breaking open the door is heard. The door gives way noisily. Romeo appears.) ROMEO This is the place!... (with a feeling of terror) Hail, gloomy and silent tomb! A tomb? No, no! O resting place morebeautiful than the heavenly mansion itself! How bright thy front! A palace it outvies! (catching sight of Juliet, and starting forward towards the tomb) Ah, there she is! It is she! Come, mournful light, come show her to me. (taking up the funeral lamp) |
Ô ma femme ! Ô ma bien-aimée ! La mort en aspirant ton haleine embaumée N’a pas altéré ta beauté ! Non ! non ! cette beauté que j’adore Sur ton front calme et pur semble régner encore Et sourire à l’éternité ! (Il repose la lampe sur le tombeau.) Pourquoi me la rends-tu si belle, Ô mort livide ? Est-ce pour me jeter plus vite dans ses bras ? Va ! c’est le seul bonheur Dont mon cœur soit avide ! Et ta proie aujourd’hui ne t’échappera pas. (regardant autour de lui) Ah ! je te contemple sans crainte, Tombe où je vais enfin près d’elle reposer ! (se penchant vers Juliette) Ô mes bras, donnez-lui votre dernière étreinte ! Mes lèvres, donnez-lui votre dernier baiser ! (Il embrasse Juliette, puis, tirant de son sein un petit flacon en métal et se tournant vers Juliette.) À toi, ma Juliette ! (Il vide le flacon d’un trait et le jette.) JULIETTE (s’éveillant peu à peu) Où suis-je ? ROMÉO (tournant les yeux vers Juliette) Ô vertige ! Est-ce un rêve ? Sa bouche a murmuré ! (saisissant la main de Juliette) Mes doigts en frémissant Ont senti dans les siens la chaleur de son sang ! (Juliette regarde Roméo d’un air égaré.) Elle me regarde et se lève ! JULIETTE (soupirant) Roméo ! ROMÉO Seigneur Dieu tout-puissant ! Elle vit ! Elle vit ! Juliette est vivante ! JULIETTE (reprenant peu à peu ses sens) Dieu ! Quelle est cette voix, dont la douceur m’enchante ? |
O my wife! O my beloved! Death, that hath sucked the honey of thy breath hath had no power yet upon thy beauty! No! No! That beauty I worship on your calm, pure countenance still seems to reign and to smile to Eternity! (He sets down the lamp upon the tomb.) Why do you give her back to me so beautiful, o ghastly death? Is it to throw me more swiftly into her arms? Come! This is the only happiness for which my heart is eager! And today your prey shall not escape you. (looking about him) Ah, I contemplate you without fear, you tomb where at last I shall rest beside her! (bending towards Juliet) O my arms, give her your last embrace! My lips, give her your last kiss! (He kisses Juliet; then, drawing a little metal flask from his breast and turning towards Juliet:) To you, my Juliet! (He empties the flask at a draught and throws it away.) JULIET (gradually awakening) Where am I? ROMEO (turning his eyes towards Juliet) O, my head reels! Is this a dream? Her lips murmured! (seizing Juliet’s hand) My trembling fingers felt in hers the warmth of her blood! (Juliet turns a bewildered look upon Romeo.) She looks at me and raises herself! JULIET (sighing) Romeo! ROMEO Lord God Almighty! She lives! She lives! Juliet is alive! JULIET (gradually coming to her senses) God! What voice is that whose sweetness enchants me? |
ROMÉO C’est moi ! c’est ton époux Qui tremblant de bonheur embrasse tes genoux ! Qui ramène à ton cœur la lumière enivrante De l’amour et des cieux ! JULIETTE (se jetant dans les bras de Roméo) Ah ! c’est toi ! ROMÉO Viens ! viens, fuyons tous deux ! JULIETTE Ô bonheur ! JULIETTE, ROMÉO Viens ! fuyons au bout du monde ! Viens, soyons heureux, Fuyons tous deux Viens ! Dieu de bonté ! Dieu de clémence ! Sois béni par deux cœurs heureux ! ROMÉO (chancelant) Ah ! les parents ont tous des entrailles de pierre ! JULIETTE Que dis-tu, Roméo ? ROMÉO Ni larmes, ni prière, Rien, rien ne peut les attendrir ! À la porte des cieux ! Juliette, à la porte des cieux ! et mourir ! JULIETTE Mourir ! Ah ! la fièvre t’égare ! De toi quel délire s’empare ? Mon bien-aimé, rappelle ta raison ! ROMÉO Hélas ! Je te croyais morte et j’ai bu ce poison ! JULIETTE Ce poison ! Juste ciel ! |
ROMEO It is I! it is your husband who, trembling with happiness, embraces your knees! Who brings back to your heart the intoxicating light of love and of heaven! JULIET (throwing herself into Romeo’s arms) Ah! ’Tis thou! ROMEO Come! Come! Let us flee together! JULIET O happiness! JULIET, ROMEO Come! Let us flee to the ends of the earth! Come! Let us be happy, let us flee together. God of goodness! God of mercy! Be Thou blessed by two happy hearts! ROMEO (staggering) Ah, but all our kinsmen have bowels of stone! JULIET What are you saying, Romeo? ROMEO Neither tears nor entreaty, nothing, nothing can soften them! To the gates of heaven, Juliet, to the gates of heaven and to die! JULIET To die! Ah, fever bewilders you! What delirium seizes upon you? My beloved, come to your senses! ROMEO Alas! I thought you dead and I drank this poison! JULIET Poison! Just heaven! |
ROMÉO (serrant Juliette dans ses bras) Console-toi, pauvre âme, Le rêve était trop beau ! L’amour, céleste flamme, Survit même au tombeau ! Il soulève la pierre Et, des anges béni, Comme un flot de lumière Se perd dans l’infini. JULIETTE (égarée) Ô douleur ! ô torture ! ROMÉO (d’une voix plus faible) Écoute, ô Juliette ! L’alouette déjà nous annonce le jour ! Non ! non, ce n’est pas le jour, ce n’est pas l’alouette ! C’est le doux rossignol, confident de l’amour ? (Il glisse des bras de Juliette et tombe sur les degrés du tombeau.) JULIETTE (ramassant le flacon) Ah ! cruel époux ! de ce poison funeste Tu ne m’as pas laissé ma part. (Elle rejette le flacon et portant la main à son cœur, elle y rencontre le poignard qu’elle avait caché sous ses vêtements, et l’en tire d’un geste rapide.) Ah ! fortuné poignard, Ton secours me reste ! (Elle se frappe.) ROMÉO (se relevant à demi) Dieu ! qu’as-tu fait ? JULIETTE (dans les bras de Roméo) Va ! ce moment est doux ! (Elle laisse tomber le poignard.) Ô joie infinie et suprême De mourir avec toi ! Viens ! un baiser ! Je t’aime ! JULIETTE, ROMÉO (se relevant tous deux à demi dans un dernier effort) Seigneur, Seigneur, pardonnez-nous ! (Ils meurent.) |
ROMEO (clasping Juliet in his arms) Console yourself, poor heart, the dream was too beautiful! Love, a celestial flame, survives even the tomb! It raises the stone and, by the angels blest, like a wave of light loses itself in the infinite. JULIET (distraught) O anguish! O torture! ROMEO (in a voice grown weaker) O Juliet, listen! Already the lark is telling us it’s morn! No! No, it is not day, ’tis not the lark! It is the gentle nightingale, love’s confidant! (He slips from Juliet’s arms and falls down on the steps of the tomb.) JULIET (picking up the flask) Ah, cruel husband! You have not left me my share of this poison. (She throws away the flask, and carrying her hand to her bosom comes upon the dagger she had hidden in her dress, and in a swift movement draws it forth.) Ah, happy dagger, your help remains! (She stabs herself.) ROMEO (half rising) God! What have you done? JULIET (in Romeo’s arms) Ah! this moment is sweet! (She drops the dagger.) O infinite, supreme joy of dying with you! Come! One kiss! love you! JULIET, ROMEO (half-raising themselves with a last effort) Lord, Lord, forgive us! (They die.) |
libretto by Jules Barbier, Michel Carré | libretto by Joseph Allen, 1969 |